mercredi 27 juin 2012

ël dì qu'le galìn-e pissràn

 
 


Au royaume de Saint-Glinglin vivaient tant bien que mal - mais surtout mal - les Jamais et les Tard.
Depuis toujours c'est à dire depuis qu'un illustre inconnu avait déclaré Mieux vaut Tard que Jamais, le conflit était permanent et la guerre inégale car pour faire bonne mesure les Jamais se déplaçaient toujours par trois, jamais deux mais trois.

Ainsi il y avait les trois Jamais-sans-ma-fille, les prudents sait-on-Jamais, les pressés maintenant-ou-Jamais et les ce-soir-ou-Jamais, les réfractaires Jamais-Delavie et les ronchons Jamais-Content et bien d'autres Jamais.
Tout ce petit peuple se retrouvait la semaine des quatre jeudis au restaurant "Au-grand-jamais" tandis que les Tard tenaient conseil tous les 36 du mois parmi lesquels les Tôtoutard, les laxistes Couchetard, Lèvetard et Aplutard et les éternels absents Trotard. 
Ces jours-là tous les Tard laissaient à la maison moutards, vantards et bâtards pour se poser l'éternelle question : Cuando las ranas crien pelo, ce qui signifie dans notre langue  Quand les poules auront-elles des dents?
De leur côté - la semaine des quatre jeudis - tous les Jamais s'interrogeaient : Quand les grenouilles auront-elles des poils?

Au grand désespoir du roi de Saint-Glinglin, chaque camp cherchait en vain une réponse qui ne venait pas.
Les uns proposaient : When pigs fly, qui signifie dans notre langue Quand les porcs voleront en escadrille.
Les autres suggéraient : When hell freezes over, qu'on peut traduire par Quand le diable se les gèlera.

Et puis un jour vint - un jour différent des autres jours - non pas qu'on vit des cochons habillés en stewart ou bien encore des grenouilles en train de se raser mais l'écho d'un cri inconnu résonna dans tout le royaume :
Le galin-e pissran! Le galin-e pissran! Le galin-e pissran! Le galin-e piss... ...
(Je sais, plus on répète et moins on comprend mais l'information était d'importance)
Le galin-e pissran! (Pardon, j'arrête et j'explique)
Quelqu'un avait vu les galines pisser! ce qui était une première au royaume de Saint-Glinglin.
On nomma ce jour Toujours, on mit des couche-culottes aux galines et la réconciliation eut lieu entre les Tard et les Jamais.

Si vous passez un jour dans la région, faîtes le détour par Saint-Glinglin, il n'est jamais trop tard... pour voir des galines en couche-culottes !
 
 
publié sur MotImageCitation sur le thème JAMAIS









samedi 23 juin 2012

Chaud devant, cré vain diou!

 
 
Sur un thème des Défis Du Samedi



Je ne suis pas n'importe quel colimaçon
un vulgaire petit-gris, un Corse mollasson
Je suis un Bourguignon, hermaphrodite certes
mais Helix pomatia et bête à cornes experte.

De Gevrey-Chambertin, mon village natal
il en faut pour me faire sortir de ma coquille
échalote, persil, ail et beurre, la totale
de Noël à Toussaint pourvu qu'on me persille.

Les beusenots* comme nous il faut se les farcir
et s'il manque à nos pied la marche à reculons
il n'y a pas plus fier qu'un fieffé Bourguignon.

On en bave c'est vrai mais on a des excuses
sauvés des prédateurs, au chaud dans la cambuse
c'est bien en persillé que l'on meurt de plaisir.


beusenot* : niais, naïf



mercredi 20 juin 2012

Opération Camomille

Publié sur MotImageCitation
 



 


"Ah Inspecteur La Bavure, pas faché de vous avoir au bigophone"
"Qu'est ce qui vous amène Ouatson?"
"L'opération Camomille, chef!!"
"Jamais entendu parler. C'est quoi ça, encore?"
"Et bien, c'est rapport à l'enquête sur les emplois fictifs et au type qu'on a retrouvé avec un couteau pas fictif entre les épaules, chef. On a trouvé du vrai Chamaemelum nobile dans les poches du malheureux, chef"
 "Qu'est ce que Tchernobyl vient faire là dedans, Ouatson?"
"Euh... Chamaemelum nobile, chef ou si vous préférez la camomille romaine. Il en avait plein les poches au point qu'on a d'abord cru à des herbes hallucinogènes du genre Tabernanthe Iboga ou des Datura, enfin des trucs pas catholiques, chef"
"Vous connaissez tout ça vous, Ouatson?"
"Bien sûr chef, j'ai fait botanique au collège et tout petit j'avais un herbier avec tout une collect...."
"Ca va! Et pourquoi serait-ce de la camomille?"
"J'ai confié les analyses à Ouatelse chef, histoire de voir ce que votre nouvelle recrue a dans le carafon"
"Ouais... elle doit en avoir autant que vous! Et alors?"
"Et bien elle a hésité entre camomille d'Anjou et camomille puante puis elle l'a essayé elle même d'abord en bain de pieds, en tisane puis en fumigation, cataplasme et même distillé à l'alambic"
"Et alors?"
"Et bien inspecteur, c'est sans appel! C'est bien de la camomille vu qu'elle dort depuis trois jours"
"Vous croyez que je vous paie pour dormir? Vous allez me réveiller cette chimiste à la noix, et tout de suite!"
"C'est que je crois déjà avoir tout essayé, chef"
"Et le café? Vous avez essayé le café?"
"Euh... ça marche pas sur elle, inspecteur"
"Et pourquoi ça? Le café ça marche, même sur les incapables!!"
"Euh... c'est écrit dans son dossier, chef! Ouatelse fait une grave allergie au café, rapport à son nom"
"Quoi, son nom?"
"Ouatelse chef..." 
 

lundi 18 juin 2012

Téléphone Nintendo

  Publié aux Impromptus Littéraires sur le thème Coup de fil
 
  telephone.jpg

Allo? Ze voudrais parler au papa Noël
   Ne quittez pas... vous serez redirigé dans un instant... sinon rappelez ultérieurement
(Bruits de fond divers, d'été, chuintement, chute d'eau)
   Veuillez préciser s'il s'agit d'eaux de surface provenant de cours d’eau, de  remontées d'égouts ou d'eaux souterraines?
Euh! Ze sais pas, c'est pas moi
   Vérifiez aussi que le cordon de ligne est bien raccordé à la prise murale femelle RJ12
Z'avais zuste demandé papa Noël
   Pour contacter un responsable de la Sécurité et des Situations d’Urgence, appuyez sur le 12 et maintenez enfoncé.
Z'ai pas de tousse 12!
   Merci de taper le numéro d'accord de coopération avec la police au niveau le plus pertinent... local, municipal, cantonal, national, international ou planétaire
Ze voudrais zuste un zeu de Big Zim avec la zeep!
   Pour votre sécurité, ne placez pas les mains ou les pieds à proximité du zip ou sous des pièces en rotation
Euh... et quatre piles LR6 ressarzables siouplait
(Bruits de fond divers, chute d'iceberg)
   Pour une glace au bacon, appuyez sur la touche 2 avec l'index... pour plus de bacon appuyez avec le majeur.
Z'ai que six ans et ze croyais que papa Noël y parlait français?
   Ici Londres ! Les Français parlent aux Français...
Ze crois bien que z'ai dû faire une bêtise
(Appui fébrile sur la touche 2)
   Pour nominer Kevin, appuyez sur la touche 4 en maintenant la touche 5 enfoncée, puis relâchez la touche 5 sans relâcher la touche 4
Ze l'ai fait mais ça marsse pas
(Bruit de tonnerre)
   En cas d'orage, il est préconisé de ne pas utiliser cet appareil
Ze m'en fout!! 
   Si vous souhaitez laisser un message, dites 'message' sinon ne dites rien
RIEN !




samedi 16 juin 2012

La genèse pour les Nuls


Chapitre 2 :  Le Y-en-a-pas

zero.jpgOn a tendance à croire qu'au commencement Dieu créa le ciel et la terre, la nuit et le jour et qu'ainsi fut le premier jour, sauf qu'avant le premier jour il n'y en avait pas et qu'il avait donc bien fallu commencer par créer le "Y en a pas".
Ainsi naquit le "Y en a pas" que Dieu baptisa d'abord Zéfiro, puis Zéro pour faire plus simple.
Difficile d'ailleurs de faire plus simple tant Zéfiro était simple avec un corps vaguement rond d'où ne dépassaient ni tête ni membres - si tant est qu'il en eut besoin - et Dieu comprit aussitôt qu'il ne pourrait pas compter sur lui tellement il se montra nul.

Pas très fier de son prototype, Dieu ne cessait de pester et le harcelait par ses: "Des comme toi, y en a pas deux", ce à quoi Zéfiro répondait, l'air de rien :"Il ne tient qu'à toi - nom de Dieu - de faire que nous soyons plusieurs".
Dans sa grande bonté mais redoutant le pire il fit donc "Y en a plus" et son jumeau "Y en a encore" puisque quand y en a plus, y en a encore.
Ils formaient alors ce qui allait devenir le fameux "Et-un-et-deux-et-trois-zéros", éclipsant le non moins fameux "La-tête-à-Toto"!

On a beau dire que Zéro est pair, sa parité est discutable et on sait aujourd'hui qu'il ne se reproduisait pas et que seule l'intervention divine a pu lui permettre de se multiplier; ainsi naquirent "Y en a déjà", "Y en aura demain", "Y en avait hier", "Y en a jamais eu" et bien d'autres "Y en a"... jusqu'au jour où "Y en a marre" mit un terme à cette lignée d'inutiles.

"Y en a pas un pour racheter l'autre" se lamentait Dieu en contemplant cet alignement de zéros qui ne servaient à rien sinon à répéter inlassablement ce slogan débile : "On est des zéros parce qu'on le vaut bien".
"Si c'est ça la Création " se lamentait Dieu "autant aller se noyer" mais aucun fleuve n'avait encore été inventé ni le Déluge prévu 1656 ans plus tard.

Heureusement, le lendemain du commencement qui tombait justement un lundi vit la création du ciel et de la terre, et ainsi fut le jour "Zéfiro-plus-Un" qu'il appela d'abord Zéphirin puis plus logiquement Premier jour... on connait la suite.







lundi 11 juin 2012

Treasure Island ou la mission


Riviere.jpg
© crédit photo : Toncrate

Qui avait bien pu aborder Notre île ce jour-là en volant Notre "Intrépide"? ou plutôt la barque que nous prêtait P'tit Louis moyennant quelques roudoudous ou carambars fruités.
Ce n'était pas le père Gautherot qui ne jurait que par son bateau-passoire souvent entre deux eaux et lui entre deux kirs.
Ce n'étaient pas ces Parigots qui ne venaient jamais en Août, prétextant l'ardeur insoutenable de notre soleil.
Qui osait ainsi pénétrer Notre sanctuaire et peut-être investir Notre cabane et y voler Nos trésors?

De la rive, Faustine n'avait pas tardé à réagir et nous désigna, Blaise et moi volontaires d'office - car nous n'étions qu'un trio de trois - pour une mission de reconnaissance qui s'annonçait des plus dangereuses.
Non pas que la rivière fut trop large ou trop agitée mais le peu d'eau à cet endroit cachait autant de pierres glissantes que de trous sournois où l'on laissait tout à la fois une sandale et notre honneur...
Comme Blaise commençait à flageoler sur ses guiboles, Faustine nous lança son fameux regard bleu électrique qui nous ôtait toute envie de reculer et finissait toujours par nous faire faire n'importe quoi. Ne nous avait-elle pas en guise de guimauve fait croquer de son piment des squelettes?

Le pacte fraîchement signé entre nous au feutre indélébile et qui nous liait à Notre chère île ne pouvait être dénoncé pour si peu, d'autant plus qu'il résistait aux énergiques frictions de nos parents lors de l'incontournable toilette du soir.
On allait devoir retirer nos chaussettes pourtant rarement archi-sèches, s'armer de courage et de solides bâtons pour atteindre le banc de sables mouvants d'où nous gagnerions Notre île si nous sortions indemnes d'un enlisement inévitable.
Le rescapé, si le Ciel le permettait devrait alors se frayer un passage dans la jungle inextricable de buissons, aulnes, saules et épineux qui mangeaient les rives de Notre île et où nous laissions souvent lambeaux d'épiderme et accrocs multicolores. 
Notre bravoure - que dis-je, notre héroïsme - se mesurait au nombre d'épines d'acacias et de cloques d'orties que Faustine soignait de ses doigts experts et surtout de cette boue miraculeuse à l'odeur de crottin dont elle seule avait la recette.

J'en étais là de mes poétiques pensées quand un grand splash nous annonça le naufrage de Blaise et sa probable relégation au rang de Triple Andouille, rang que nous occupions à tour de rôle ou simultanément et trop souvent à notre gré!
Le bleu électrique ayant viré au sombre, je ressentis d'un coup tout le poids de la mission sur mes frêles épaules et, ayant désespérément cherché derrière moi un invisible partenaire je souris bêtement à Faustine et quittai ma chère Patrie d'un pas que je voulais assuré.
L'eau était glaciale, couleur des yeux de Faustine et en deux secondes je réalisai que jusqu'aux chevilles je venais de perdre à jamais mes deux pieds.



Quand je repris connaissance, je constatai que l'amputation n'avait pas encore eu lieu. J'étais dans mon lit trempé de sueur sous le regard bienveillant de ma mère, seul remède à ces cauchemars qui peuplaient mes nuits et m'éloignaient de Faustine.
D'ailleurs je fus surpris et mortellement triste d'apprendre que cette année, elle ne viendrait pas... 
 
Publié aux Impromptus Littéraires   
 

lundi 4 juin 2012

Le facteur était nul

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Sans l'ombre d'un doute, le tic-tac du nouveau cadran solaire était silencieux - du moins inaudible - aussi se félicita t il de sa récente acquisition.
Certes il allait regretter l'ancien et sa forme heptadécagonale mais se faire agresser les tympans chaque quart d'heure soit quatre vingt seize fois par jour par un carillon d'harmoniques impaires à soixante dix décibels bien tassés, c'en était trop!
Il aurait dû se méfier lorsque le postier l'avait livré un an auparavant car qui mieux que lui savait qu'un produit est nul si et seulement si l'un des facteurs est nul.

Comme toujours Sofia n'avait pas manqué de hausser les épaules - il lui sembla même l'avoir entendue opiner vivement de la tête au-delà des seize Hertz qu'il pouvait encore percevoir - et en conclut une fois de plus qu'ils ne seraient jamais sur la même longueur d'onde et qu'elle méritait bien son surnom de Pégécédé... Plus grand commun diviseur!
Cela ne l'avait pas empêché de lui faire une suite finie de cinq garçons - une malencontreuse erreur dans son calcul de densité de probabilité l'ayant privé de filles -  ces cinq là bizarrement réels et complexes à la fois et qui couraient bruyamment dans le carré du jardin poétiquement baptisé l'Hypoténuse, en rapport au cordon de pyracanthas aux épines acérées qui leur ôtait toute envie de prendre la tangente.

Pourtant la somme des termes en culotte courte s'avérant inexacte, il interpella le plus jeune qu'il avait surnommé sa fraction irréductible:
"Camille, qui manque à l'appel?"
"C'est Augustin, père... il est encore monté jouer au grenier" répondit l'irréductible cafteur tout en jonglant avec un icosaèdre tronqué que les savants nomment ballon de foot.
Il soupira... Il lui semblait qu'avec l'âge l'échelle du grenier était devenue logarithmique et, se souvenant de la loi de Murphy qui lui garantissait la chute à coup sûr doublée d'un séjour à durée indéterminée à l'hôpital du canton, il renonça à y monter.
De toute façon il savait qu'il trouverait Augustin occupé à mâcher quelque racine carrée tout en s'amusant à vérifier si le gogol est bien égal au nombre d'atomes dans l'Univers!
Bien que fragile des sinus, le gamin était de toute évidence en avance sur son âge dans tous les domaines; ne lui avait-il pas demandé récemment comment résoudre un problème quand on ne peut pas se fier à une inconnue?
Ce à quoi en bon cartésien, il lui avait répondu d'aller questionner sa mère.
Pour l'heure il scrutait désespérément son nouveau cadran en priant Dieu qu'il fasse soleil... 

samedi 2 juin 2012

Confidence dans l'oreiller

 
 



Tombées d'un édredon ou de quelque oreiller
deux plumes de canard allaient, se désolant
maudissant les ardeurs des amants turbulents
qui les avaient jetées toutes ensommeillées.

Qu'il était bon le temps des nuits célibataires,
loin des bunga-bunga, des soirées adultères
elles se prélassaient, bercées des ronflements
du paisible dormeur et de ses grognements.

Dès que la mijaurée eut investi le lit
elles comprirent qu'il y laisserait des plumes
les paisibles repos tournèrent à la chienlit

et les après-midi en sieste crapuleuse
la grasse matinée devint une coutume
(Moralité)
la plume dépérit quand on n'est pas frileuse