lundi 30 janvier 2017

La lune dans le caniveau

Publié aux Impromptus Littéraires sur le thème du film cher à Beineix






Aux quatre coins du port tu pourras me chercher
fouiller les bars minables où tu traînes ta bile
et l'impasse sordide au sang indélébile
tu ne m'y verras point, pas plus qu'au vieux marché.

J'ai rompu les amarres à mon coeur attachées
gommé tes alibis et tes belles paroles,
du docker amoureux je m'écarte et m'envole
je quitte ce taudis où tu as tout gâché.

Il parait que là-bas luit un soleil nouveau
que les hommes sont bons et les amours sincères
je quitte ma défroque de bouc-émissaire.

Je sais que l'on m'attend au royaume édénique,
je serai déjà loin de ce monde cynique
quand glissera la lune dans le caniveau

samedi 28 janvier 2017

Le coq pour les Nuls

Thème proposé par le site MilEtUne d'après l'illustration



Le coq muet est de la famille des gallines alors que le coq chantant est un galline assez!
Le chant du coq est un air à une seule onomatopée comme cui-cui ou bê-bê sauf qu'on lui a attribué cocorico – qui veut dire Cocorico en français – pour ne pas le confondre avec une chèvre.
Le coq est polygame c'est à dire capable de jouer sur plusieurs gammes.
Il est assez facile à reconnaître car si le coq caquète c'est une poule ou plus rarement un coq ayant fait son coming out; on parle alors de coquette.
Le coq claironne grâce à son syrinx, instrument semblable à une cornemuse; la cornemuse néerlandaise fait Kukeleku alors que la cornemuse vietnamienne fait O-o-o-o (si tant est qu'il y ait des cornemuses au vietnam)
On ne s'étonnera pas que la cornemuse anglaise se distingue en faisant Cock-a-doodle-do.
Depuis la première guerre mondiale on a eu l'idée de percher le coq sur les monuments aux morts mais il n'y a jamais réveillé personne.

Depuis 1976 et deux fois par an on avance ou on recule le coq afin qu'il chante aux dates et aux heures prévues.
Quand le coq se dérègle on remonte ses poids; on parle de poids coq ou poids plume selon la taille du coq.
Le coq est aussi le symbole de la Gaule matinale, processus biologique masculin qui remonte la couette et fait fuir la poulette.
En astrologie chinoise le coq est courageux, talentueux, travailleur, bavard, drôle, sportif, sociable, loyal, dévoué mais vaniteux (il y a toujours un Mais en astrologie chinoise).
Le coq de compétition – habitué des transats en solitaire – s'appelle un multicoq.
Lorsqu'on passe d'un sujet à un autre sans transition – comme ici – on dit que l'on saute du coq halal.

Prochainement: Le zaglossus bruijni pour les Nuls



Des vers pour des piafs

Publié aux Défis Du Samedi





Qui dit qu'il n'y a plus d'étourneau sansonnet ?
J'en ai vu en pâté, en daube provençale
pas plus tard qu'aujourd'hui au centre Commercial
où je venais chercher un précieux Chardonnay

Mon petit producteur en avait ras le fût
d'entendre gazouiller les sturnus vulgaris
leur goût pour les raisins, leur fièvre prédatrice
et tous ces sifflements, cliquetis, ce raffut.

Fi des effaroucheurs et des grands moulinets
il chargea le fusil de cartouches de trap
je n'avais jamais vu tant de force de frappe

La nuée s'abattit avant qu'il ne tirât
il se vit submergé, noyé, fait comme un rat
Qui niera qu'il n'est pas d'étourneau sans sonnet ?

lundi 23 janvier 2017

Ma jouvencelle

Publié aux Impromptus Littéraires d'après la phrase imposée: J'ai rajouté un peu de sel




J'ai rajouté un peu de celle
qui m'ensorcelle, celle que gemme
à mon petit coeur de bohème
émoussé, grisé, poivre et sel

J'ai rajouté un peu de selle
à cet endroit où le bât blesse
entre ensellure et sot-l'y-laisse
elle me tue ma jouvencelle

J'ai rajouté un peu de sels
je l'ai trouvée en pâmoison
contrainte au régime sans sel
draconien, plus que de raison

J'ai rajouté un peu de Celles
à notre hameau exterminé
au Salagou abandonné
sur nos clichés... quelques pixels

J'ai rajouté un peu de sel
une pincée entre deux doigts
à cet agneau montagnacois
farci fromage blanc, faisselle


(Finalement on est amants
on a rajouté du piment)

samedi 21 janvier 2017

L'enfant à l'orange

Publié sur MilEtUne d'après le tableau de Van Gogh







Je roulais en direction d'Auvers-sur-Oise – assez vite, je dois le reconnaître – attiré par la curiosité du lieu et de son histoire.
Je l'avoue. Je n'ai pas vu l'enfant à l'orange.
J'ai freiné de toutes mes forces. Quel choc!

Il était là, ce drôle de petit tableau, frais et rose comme une bonne intention.
Le maître l'avait peint à peine un mois avant le drame, avant son suicide par balle en pleine poitrine.
Garçon ou fille, peu importe, le petit diable était là bien vivant et même s'il avait trôné à côté du cercueil du maître dans cette pièce funéraire improvisée, il était plus que vivant.
J'ai effleuré du regard ses joues roses et sa robe bleue et j'ai repris ma route... prudemment.





Le bleu et le noir

Publié aux Défis Du Samedi d'après l'illustration






Le sous-sol de la maison de son aïeul tenait plus de la caverne d'Ali Baba que d'un atelier de peintre.
Il était temps pour Pablo de faire le grand ménage dans ce bric à brac.
Il s'était débarrassé de l'éternelle vareuse bleu turquoise qui le quittait rarement; c'est alors qu'entre deux esquisses sans grande valeur il avait aperçu l'étonnante composition: une miniature exécutée à la tempera sur un panneau de pin.
Pablo l'approcha d'un soupirail où la lumière d'un franc soleil pénétra à travers les couches de couleurs, faisant briller les glacis d'un éclat extraordinaire.
Ce vieux maniaque aurait appliqué à la lettre tous les secrets de l'émulsion retranscris d'une fine écriture dans ce petit carnet que Pablo venait de découvrir?
Les couleurs pures faites de pigments mélangés au liant à l'oeuf et passées les unes par dessus les autres au lieu de s'entretuer apportaient un effet lumineux haut en couleurs.
Pourtant l'oeuvre semblait enfantine comme si un apprenti-Caravage en culottes courtes avait été rompu à cette technique malgré son jeune âge.
Comme il y cherchait une signature il retourna le tableautin et il le vit !
C'était un fond abyssal d'un noir ultra-noir, un rectangle si sombre que Pablo en perdit toute notion de lieu et de temps.
Jamais il n'aurait dû le fixer si longtemps à l'oeil nu, mais longtemps ne signifiait déjà plus rien.
Jamais il n'aurait dû y poser le doigt, offrir ses mains, ses bras à ce noir qui l'aspirait.

Le sous-sol de la vieille maison ressemblait à une caverne d'Ali Baba.
On y retrouva parmi de vieux cadres défraîchis une étrange vareuse bleue turquoise et un petit carnet vierge...


mardi 17 janvier 2017

Compte à rebours

Publié aux Impromptus Littéraires



Hésitant, il posa son doigt sur l'interrupteur.
Il réalisa qu'il suffisait d'une banale pression de l'index, vingt grammes tout au plus pour provoquer la bascule d'une maigre pièce de laiton entre deux contacts dorés et lancer la machine infernale.
Pourquoi tant d'hésitation alors que les amerloques l'avaient inventée au XIXème siècle et continuaient d'en abuser malgré ses détracteurs; ça devait être une bonne chose.
Bien sûr il y avait eu des ratés au début, des expériences malheureuses qu'on avait vite enterrées, passées sous silence mais il en était de même pour toutes les inventions; le modernisme – cette machine à aller toujours plus vite – est à ce prix.

Et si le compteur électrique était sous-dimensionné, s'il allait faire disjoncter tout l'immeuble ou inquiéter le voisinage par quelque odeur suspecte?
Il avait songé un moment à acheter un groupe électrogène mais le bruit aurait alerté tout l'immeuble. Il se souhaita bonne chance, vérifia pour la dixième fois que la porte était bien fermée.
Après tout ce n'était qu'un essai à vide et personne n'en souffrirait à part son amour-propre.
Comment avait-on fait depuis des siècles sans la machine?
Il ne fallait plus y penser, tourner la page des années noires où tant d'autres l'avaient fait qui dans sa cave, qui dans son cellier avant de s'américaniser !
Son index commençait à s'ankyloser... il fallait en finir une bonne fois pour toutes ou changer de doigt le temps d'y réfléchir encore.

Il allait essayer juste deux minutes en mode rapide pour voir et puis il arrêterait tout.
Certains disaient que deux minutes ce n'était pas suffisant et qu'il leur semblait que ça remuait encore après.
De toute manière si ça sentait le brûlé il n'insisterait pas. A quoi bon faire souffrir la machine et risquer l'irréparable.
Si les réparateurs étaient rares c'est sans doute parce que ça fonctionnait bien et qu'ils craignaient le chômage, alors pourquoi s'inquiéter sans raison?
Le voisin disait que même les japonais s'y étaient mis à leur tour.
Il songea que l'attaque de Perle à Rebours avait dû être un formidable champ d'expérimentation pour les bridés et que ça leur avait donné des idées.
Et s'il avait fait le mauvais choix en achetant un modèle américain?
Le premier ministre japonais ne venait-il pas de faire un geste historique devant Obama?

Amerloque ou bridé il n'entravait rien à l'épaisse notice qu'il avait remisée dans sa boîte.
Il rouvrit la porte pour mieux la refermer.
Ce qui le souciait aussi c'était le nettoyage car ça allait peut-être gicler partout... ça gicle souvent avant de figer quand c'est frais.
Il allait basculer l'interrupteur quand il reconnut le bruit de pas du voisin – monsieur Goebel – dans l'escalier.
Et soudain le bruit des bottes qui cesse, un frôlement furtif derrière sa porte puis sa voix tonitruante:”Alors, voisin? Ça marche t'y bien c'congélateur?”




samedi 14 janvier 2017

Allo Houston

Publié sur MilEtUne d'après l'illustration





« Allo Houston... ici Mascotte... je répète... ici Mascotte»
« Allo Mascotte... veuillez répéter à nouveau»
« Ici Mascotte! Comment faut l'dire?»
« Allo Mascotte... ici maman... quand tu auras fait ta toilette et rangé ta chambre, tu pourras venir manger, s'il te plait ? »
« Allo Houston... vous n'arriverez pas à m'intimider avec vos ultimatums relou. Ma mission est d'la plus haute importance et peut pas être différée»
« Allo Mascotte... Cesse de m'appeler Houston. Je ne suis ni Whitney ni Céline Dion mais ta mère qui s'égosille à te demander de venir manger ! »
« Allo Houston... ici Mascotte... C'est quoi l'programme de la bouffe aujourd'hui ? »
“Courgettes farcies au thon maison”
« Allo Houston... maison comme téléphone maison?”
« Allo Mascotte... Courgettes farcies par moi-même et tièdes puisqu'on n'a pas l'habitude sur Terre d'attendre les spationautes pour se sustenter”
“Désolé Houston... j'peux pas risquer ce genre d'expérience nutritonnelle. Fin de comm”
« Allo Mascotte... vous devriez amorcer votre descente avant que nous cessions les ravitaillements: argent de poche, console de jeu, sorties cinéma et autres réjouissances”
« Allo Houston... J'vous capte mal... J'vais essayer sur un autre canal”
« Allo Mascotte... Il vous reste peu d'oxygène et maman Houston a épuisé ses réserves. Je vous suggère une escale technique au rayon surgelé du supermarché. Fin de comm”
(Clic)
« Allo Houston... ici Mascotte... ici Mascotte. Merde! On a dû péter un câble»



Le trou de l'Epiphanie


Publié aux Défis Du Samedi sur le thème: Derrière le mur




Au début je n'entendis rien ou presque rien.
Il faut dire que je ne suis pas du matin, alors les bruits du matin... le raffut du traditionnel cadeau de Germaine me rappelait plus celui d'une tondeuse à gazon que d'une tondeuse à barbe.
Alors j'ai ressorti le bon vieux rasoir mécanique que Germaine avait relégué dans un tiroir quand on s'était mis en ménage.
Qui dit bon vieux rasoir mécanique veut dire coupures, saignements et pansements mais c'est à ce prix que j'ai pu l'entendre.
C'était comme un chuintement, un bruissement, le souffle d'une respiration ténue que j'identifiai en collant mon oreille contre le froid du carrelage entre la paroi de douche et l'armoire à pharmacie.
Alors machinalement – par je ne sais quel étrange élan de curiosité – j'ai commencé à gratter le joint du carrelage avec mon ongle.
Et puis de grattage en grattage – seulement deux minutes chaque matin après avoir refait mes pansements et pour ne pas me mettre en retard au travail – mes ongles se sont élimés alors tout naturellement je me suis servi de la lime à ongle dont je n'avais plus d'utilité pour mes ongles hormis ceux des pieds.
J'avais calculé que si le mur était aussi friable que le joint – vous savez, ces murs d'appartement qui laissent passer les chuintements comme les éclats de scènes de ménage – s'il faisait cinq centimètres d'épaisseur et s'il se trouvait précisément de l'Autre Côté un autre joint aussi friable que le mien... et à raison de trois millimètres par jour sauf le dimanche où j'en grattais le double je franchirais la frontière dans quatorze jours soit le dimanche de l'Epiphanie, ce jour béni où Germaine se rend traditionnellement chez sa vieille tante Dolorès pour chercher la même vieille fève sucée et resucée dans une part de galette.

Germaine me regardait bizarrement depuis quelques jours, peut-être à cause de tous ces pansements sur mon visage, sur mes doigts ou à cause de l'air radieux que j'affichais en sortant de la salle de bains où je m'éternisais deux minutes de plus que d'habitude sauf le dimanche bien sûr.
De l'Autre Côté la respiration s'était considérablement amplifiée avec comme un petit sifflement poitrinaire à la fin de chaque cycle.
Alors je me suis mis à l'imaginer galbée et opaline, laiteuse à souhait avec des aréoles rosacées qui se soulevaient à chaque respiration; c'est çà... une bouche qui aspirait et une poitrine qui transpirait. Et moi donc.
Parfois un ronronnement comme le bruit du sèche-cheveux l'accompagnait.
ELLE devait les avoir longs, ruisselants sur sa croupe au sortir de la douche.
J'imaginais des fesses fermes, joufflues et un joli triangle crépu qu'en se retournant ELLE m'offrirait... IL m'offrirait?
Cette idée me glaça le sang et j'en cassai la lime à ongle.
J'étais alors passé à la visite supérieure avec un couteau pointu mais ce tournevis de fortune travaillait trop vite et je dus ralentir mon travail de sape.
Chaque matin je scrutais la fine poussière, guettant un changement de couleur ou de texture qui m'annoncerait que je touchais au but.
J'attendais ça comme attend un roi de l'évasion, traçant parfois de la pointe du couteau de grands Z comme j'avais vu le faire le héros télévisé, masqué et en noir et blanc de mon enfance.
Germaine, son truc c'était les Feux de l'amour et si je la voyais dépérir à chaque épisode, je ne donnais pas long feu de son coeur d'artichaut.
La veille du jour tant attendu, alors que la poussière avait muté en débris de joint de carrelage rose je crus que le mien allait éclater... pas le carrelage mais mon coeur.
Seul un être sublime pouvait avoir eu l'idée d'un joint de carrelage rose dans cet immeuble si triste et si fade...
Deux millimètres de rositude me séparaient d'ELLE et de son ravissant petit sifflement de poitrine.
Et si ELLE était malade? Bronchiteuse? Asthmatique ou plus grave encore?
Le ronronnement rassurant balayait mes craintes, berçait mon oreille d'une douce musique mais j'y voyais aussi le bruit d'un respirateur artificiel branché sur un corps squelettique.

Le jour suprême je crus pourtant entendre chantonner au moment où Germaine claquait la porte derrière elle... ou bien c'est moi qui fredonnais :”Un prisonnier, qui surgit hors de la nuit Gratte vers l'aventure au couteau...”
Les ultimes coups furent fébriles et maladroits, je me coupai deux fois car j'avais éteint la lumière pour mieux découvrir l'Autre Côté, mais sans crier gare la dame léboucha... pardon, la lame déboucha.
J'avais tant de fois collé mon oreille au trou que j'hésitais cette fois à y risquer mon oeil.

Heureusement car de l'Autre Côté ON fouillait aussi de la pointe d'un vrai tournevis!!
Pour un peu nos deux pointes avaient failli ferrailler comme dans l'épisode Zorro contre Cupidon.
L'outil ennemi ayant rageusement fourragé puis pénétré délibérément dans MON trou, il se retira enfin.
L'oeil que je vis était clair, presque translucide avec un iris gris foncé... à coup sûr une personnalité à double facette, une Dr Jekyll ou une Mrs Hyde?
Pourquoi ai-je bredouillé: “Vous avez d'beaux yeux, tu sais...”; je n'en sais fichtre rien.
Peut-être n'était-ce que l'oeil d'un chat ronronnant au spectacle de sa maîtresse nue?
De l'Autre Côté ELLE s'était mise à rire; le ravissant petit sifflement poitrinaire s'était mué en un rire gras, un bon gros rire de femme bien nourrie, vulgaire, obscène.
Je l'ai entendue brailler à quelqu'un d'autre :”Ca ira comme ça pour accrocher ton foutu tableau?”
L'Autre a dû dire oui car l'instant d'après, MON trou fut masqué – comme le héros télévisé et en noir et blanc de mon enfance – par quelque affreux cadre de supermarché.

Je me souviens qu'il était dix heures.
En chevauchant à bride abattue tout en comprimant mon doigt sanguinolent avec un mouchoir, je devrais arriver à temps à Monterrey – enfin, à Montreuil – chez la vieille tante Dolorès pour gagner cette vieille fève... et faire une reine.


lundi 9 janvier 2017

Chambre d'hôtes

Publié aux Impromptus Littéraires sur le thème : A l'ombre du figuier
 



Eve vit que l'arbre était bon à manger et agréable à la vue”
(Gourmande, aveugle et il a fallu que ça tombe sur moi)
Elle prit de son fruit, et en mangea; elle en donna aussi à son mari et il en mangea”
(Fallait vraiment que j'aie faim)
Leurs yeux s'ouvrirent, ils virent qu'ils étaient nus, et ayant cousu des feuilles, ils s'en firent des ceintures”.
Là c'est pas faux mais qu'est-ce que les historiens ont pu raconter comme salades après ça!
Vous avez déjà vu une ceinture de feuilles de pommier ou pire d'olivier ?
Bonjour le design du slip... Evidemment que c'était un figuier, le même que celui sous lequel on est toujours là avec Eva.
Les feuilles sont plus rugueuses que velues, malgré ce qu'on en dit mais assez grandes – sans me vanter – pour cacher mes bijoux de famille.

A propos de famille, Eva c'est ma meuf et moi c'est Adam... John MacAdam, cantonnier au Mont des oliviers, enfin... au mont des figuiers.
Si on m'avait dit que ça nous attirerait autant de pépins j'aurais jamais accepté de consommer ce truc, ou alors en décoction, à la rigueur en cataplasme.
Après ce fameux jour où on s'est retrouvés honteux à poils elle et moi, on avait refilé des figues au Tout-Puissant histoire d'apaiser ses quintes de toux – son courroux divin – et ça avait bien marché.
Depuis IL nous fichait une paix royale ou une paix céleste si vous préférez.

Je dois reconnaître que Eva est douée pour la tarte aux figues mais sortis des figues rôties et du filet de canard sauvage aux figues – qu'on appelle aussi filet d'enfant du Bon Dieu – on mange surtout des compotes de figue. Je reconnais que c'est pas très varié mais on n'a jamais la courante et c'est une bonne chose.
La figue apaise aussi les douleurs menstruelles d'Eva quand débarquent ses grands bretons, des relations éloignées qui arrivent avec la lune et qui m'empêchent d'en avoir... des relations.
Je dis que nous imposer de vivre là-dessous c'est de la barbarie!

Parait qu'en huile c'est bon contre les rides et les vergetures, alors depuis qu'IL nous a appris qu'on était devenus mortels on l'utilise en massages et en shampoing.
Paraitrait aussi que ça rend intelligent mais on n'a personne ici pour comparer avec nous à part LUI qui est hors concours et les grands bretons mais on comprend pas tout ce qu'ils disent.
C'est quand même relou ce qu'on peut faire avec notre arbre: Eva s'est bricolé un soutif en laissant sécher le lait qui coule des feuilles coupées, un coeur croisé de latex à faire pâlir les autres s'il y en avait d'autres.

L'ombre du figuier c'est un peu maléfique pour les novices mais on a un truc pour le cas où vous auriez des figuiers qui font de l'ombre: il suffit de faire une incision dans le tronc.
Parait que l'incision du tronc ça LUI a donné une idée là-haut: IL appelle ça le Denier du Culte.
Dieu soit loué l'incision ça me permet surtout de faire ma liqueur, un truc alambiqué, agréable et désagréable à la fois, comme qui dirait mi-figue mi-raisin et que les grands bretons appellent bioéthanol; parait qu'ils mettent ça dans leurs chars pour les faire avancer... des chars qui roulent à gauche! Faut être un peu taré.

L'an prochain si Dieu le veut et si on arrive à trouver un accord sur le travail dominical on fera chambre d'hôtes: “A l'ombre du figuier” ça sonne bien.
Je vois d'ici l'annonce:
Ecrin de verdure, vue imprenable, adresse tatouée sur une fesse de bouc.
On va se faire un max de money comme disent les grands bretons d'Eva.