dimanche 15 mars 2015

Une femme dans chaque stade

Publié sur le site MilEtUne d'après l'illustration ci-dessus

En matière de sport, oncle Hubert était intarissable au point qu'il semblait avoir baigné dans toutes les disciplines hormis le water-polo... mais j'y reviendrai.
Il fallait l'entendre nous raconter l'époque où il côtoyait les Chéribibi, l'Ange Blanc et autre bourreau de Bethune ou plus précisément la fille ainée du gardien de la salle Wagram, lieu où il assistait gratuitement et en payant de sa personne à toutes les soirées de catch jusqu'à ce qu'elle tombe en ruine... la salle Wagram, pas la fille du gardien.
Du catch, nous retiendrons la fureur des coups mortels à vous ressusciter un boeuf, les vaines vociférations d'un arbitre rachitique, la dureté des sièges comparée à la mollesse des lèvres de la fille-ainée-du-susdit-gardien-de-la-salle-Wagram qui finit par tomber en ruine.
Celle-ci - la fille du gardien, pas la salle - ayant subitement pris du ventre, oncle Hubert déserta la salle au plus vite, mettant du coup un frein à sa carrière de catcheur.
 
Par dépit il s'était essayé à l'haltérophilie - ayant entendu dire par certain spécialiste au zinc du Café des Sports que “La bière des haltères” - et il conservait de cette époque mémorable une splendide 'galette' - médaille d'or gagnée dans ce même café - curieusement fondue en l'année 1664 et ornée des armes du duché de Kronenbourg.
 
Puis lui était venue cette envie saugrenue de pratiquer le water-polo jusqu'à ce qu'il y renonce pour une raison qui nous laissa perplexes!
Il aurait bien aimé nous faire prendre des limaces pour des cagouilles mais on n'était pas nés de la dernière rabasse comme on dit chez nous. Croirez-vous qu'il abandonna l'idée du water-polo, faute de parvenir à apprendre à nager à son cheval nommé Crazy Horse ?
Oublions cette anecdote et le sourire malicieux d'oncle Hubert.
 
C'est pourtant lui qui sut me donner la passion du vélo, à l'époque où pour moi la petite reine n'était encore que cette accordéoniste rousse à la robe virevoltante et prénommée Yvette, qu'un troupeau de pédaleux suant et malodorant suivait sans relâche mais à bonne distance par peur d'écraser ses canards.
Il fallait voir Oncle Hubert exhiber fièrement ses mollets en forme de bouteilles de Perrier - bien qu'il ne jurât que par la Kro - ainsi qu'un morceau de dossart arraché en haut du col de Peyresourde à un certain (il disait Iop en sautant sur une selle imaginaire) Zoetemelk.
Tous ces noms étrangers me faisaient rêver et je découvrais qu'au delà de nos contreforts bourguignons vivaient des gens qu'on nommait des néerlandais, des suédois, je dirai même des extra-terrestres, bien avant qu'Armstrong n'aille pédaler sur la lune!
Je passerai allègrement sur ses expériences douteuses et vite avortées comme la lutte Gréco romaine inspirée par la vogue des filles de Saint-Germain-des-Prés, la nage avec palmes (peu académiques à son goût) et les raquettes à neige dont il chercha longtemps la petite balle jaune!

Il terminait toujours le récit des ses exploits par sa marotte, le twirling bâton qu'il avait découvert en la personne de Philomène, un quintal (pourtant il n'y a pas de féminin pour quintal) emmaillotée, ambidextre aux poignets vigoureux qui exerçait aux Twirleuses de Baigneux-les-Juifs et dont la moustache naissante mettait notre oncle dans tous ses états.
On ne saura jamais ce qui de la pilosité ou de la vigueur du poignet de Philomène fit naître en Oncle Hubert cette tocade pour les Pom-Pom girls, car le quintal était marié et le mari lui ôta toute envie d'approfondir la discipline!

“Une femme dans chaque stade” fut sa devise et brisa aussi toutes ses ambitions.
Si - de là-haut - il pouvait voir aujourd'hui ce calendrier des Vieilles Couennes du stade “cramponnés” à une passion qui ne s'éteindra pas il dirait haut et fort, malgré son aversion pour ce ballon pas assez rond à son goût:”Allez les petits!” et surtout “Allez les petites!”







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