lundi 1 octobre 2018

Les Inopinés Linéaires

Publié aux Impromptus Littéraires… les vrais !



Le rideau s'ouvre en grinçant sur un appartement cossu de Versailles.
Germaine – chignon-choucroute à la Bardot et peignoir molletonné de chez Thermolactyl – regarde côté cour vers chez Marie-Antoinette sa voisine
Moi – dit Biquet dans l'intimité – regarde côté jardin, mon côté bucolique mais en un mot.

Moi (en mon for intérieur cossu) : Faudra qu'j'arrange ce rideau

Germaine (ébaubie) : T'as vu ça, biquet ? Un prompt tue !
Biquet (jamais ébaubi) : Where ? dans la gazette ?
Germaine : Non, à Versailles... chez nous. C'est écrit : « Un prompt tue à Versailles »
Biquet (inspiré) : C'est des rapides les loubards de Versailles
Germaine : Pour sûr, ça s'est joué en un acte
Biquet : Et on sait qui est l'auteur ?
Germaine : La maréchaussée l'a identifié comme étant un certain Poclin, J.B. Poclin, un bateleur qui se fait appeler Molière.
Biquet : Tu veux dire Molière... comme la rue ?
Germaine : Tout juste mon biquet, comme la rue Molière puisque c'est là qu'il a zigouillé sa victime
Biquet (ébahi) : Tu crois pas qu'il faut être tordu pour prendre le nom du lieu où on commet son forfait ?
Germaine : Attends. Tu sais pas la meilleure, biquet. Ses complices avaient pris un nom de rue limitrophe
Biquet (goguenard) : Y a une rue Limitroff à Versailles ?
Germaine : Ouais, y en a plein
Biquet (toujours goguenard) : Y a plusieurs rues Limitroff à Versailles ? C'est futé pour brouiller les pistes
Germaine : Nonobstant, les complices se faisaient appeler Lamartine et Racine. Les trois rues donnent sur la rue Boileau où les attendait un complice du même nom.
Le petit plaisir du matin pour Germaine, c'est de placer nonobstant dans nos conversations ; elle prétend que ça fait très Versailles

Biquet (spirituel) : Je plains le type qu'aurait attendu rue du Cul du Putois
Germaine : Pouah ! Me dis pas qu'y'a une rue du Cul du Putois à Versailles !
Biquet : Oublie ça. J'voulais être spirituel
Germaine : Finalement y z'ont pincé toute la troupe... le gang des Littéraires ainsi que la femme de l'auteur, la susdénommée Béjart
Biquet (expert en balais) : Maurice Béjart ?
Germaine : Mais non gros ballot, sa femme s'appelle pas Maurice mais Armande
Biquet (de plus en plus spirituel) : Tiens ? J'aurais juré qu'un saltimbanque avait écrit Ma femme s'appelle Maurice
Germaine : Alors ça doit être une coquille, mon biquet. Y z'auraient bien besoin qu'on leur apprenne à écrire tous ces écrivaillons !
Biquet : Y mettent des coquilles dans les gazettes, maintenant ?
Germaine (pointillée) : ...
Biquet : Tu sais Germaine, j'me dis que je ne suis pas plus ridicule qu'eux en écrivant par moi-même
Germaine : C'est sûr mon biquet. J'suis fière de toi qui écris si fidèlement dans ce bulletin... comment déjà ?
Biquet (soupirant) : Les Inopinés Linéaires
Germaine : Voilà ! C'est comme t'as dit. J'me ferai jamais à ce nom tordu. Les créateurs auraient pu choisir quelque chose de plus digeste
Biquet (un brin nostalgique) : Tu sais Germaine, au siècle dernier ça s'appelait Coïtus Impromptus

Le peignoir molletonné de chez Thermolactyl se met à frissonner
Germaine (aguichée fermée) : J'aime mieux ça
Biquet (deux brins nostalgique) : C'est d'l'histoire ancienne. Faut vivre avec son temps, Germaine
Germaine : Tu t'fais appeler comment déjà ?
Biquet (soupirant) : Vegas sur sarthe
Germaine : Drôle de nom de rue
Biquet : T'as pas tort Germaine... un nom à coucher dehors







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