Silence
publie aux Defis Du Samedi...
Ce matin le pic vert a frappé au carreau d'un grand coup de bec sonore qui m'a fait sursauter.
"Que
veux tu?" lui ais-je dit, à peine revenu de ma surprise. Il m'a regardé
effrontément comme pour me dire :"Je ne veux rien, je suis ici chez moi,
c'est
tout".
C'est
vrai, il était chez lui et dans un éclair vert et rouge il a quitté
l'appui de fenêtre et s'en est allé s'accrocher au poteau de clôture le
plus proche, lui a
donné deux coups de bec bien sentis avant de s'envoler vers le bois.
C'est
là où je vis mais ce lieu est à tout le monde, au randonneur chevronné
et au promeneur tranquille, au gourmand cueilleur de mûres et au goûteur
de silence, au
cycliste trop pressé et au cavalier solitaire.
Le
silence je le goûte au crépuscule quand tous les oiseaux ou presque se
sont tus, quand le chevreuil curieux franchissant je ne sais où la
clôture de la prairie
voisine vole aux percherons quelques maigres touffes d'herbe, quand
les lapins font la course en agitant leur fanal blanc, quand la
multitude de lézards a regagné ses trous ou le couvert des
tuiles du toit encore tièdes.
Alors
j'entre sous la voute ténébreuse de chênes et de sapins comme dans une
grotte végétale et le discret bruit de mes pas dans la sente me fait
l'effet d'un
martèlement terrible; c'est le moment magique où je m'arrête pour
écouter l'inaudible, l'imperceptible craquement sec d'un sapin, le
bruissement des feuilles comme un lointain ressac ou le
premier cri de la chouette mystérieuse.
La
pénombre enveloppe tout et c'est le signe du retour dans les senteurs
des buis odorants et des prairies surchauffées; je pousse le portillon,
abandonnant le
sentier à tous ceux qui cherchent un peu de sérénité... et à tous
les autres aussi.
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