jeudi 30 avril 2015

Hermione, fille de Mén...Hélas

Publié sur le site MilEtUne sur le thème l'Hermione



Nous étions quatre vingt mais par un 6 Beaufort
les plus audacieux cramponnés aux cordages
on fit dans la tornade un rapide sondage
nous nous comptâmes dix en quittant Rochefort.

Les filles avaient vomi bien avant qu'à Bordeaux
on charge les tonneaux et la bouffe d'un mois,
on eut dit de blafards fantômes, excusez-moi
les poissons se goinfraient, faisaient des ronds dans l'eau.

Le ciel vers le ponant venait de s 'assombrir
un slogan circulait : Voir Yorktown et mourir...
On a largué les ris, oubliant les amarres

L'Hermione cabrée emporta la tribune
Juppé, les officiels, tout le port de la Lune,
moi j'ai pris un billet Bordeaux-Montélimar.



lundi 27 avril 2015

Déballer c'est ballot

Sur le thème de l'inventaire farfelu publié aux Impromptus Littéraires



Je m'accroupis devant la caisse à inventaire. Il en sort un bout - une sorte d'élastique - alors je tire sur le bout pour voir ce qu'il y a à l'autre bout et voilà tout ce qui est venu... c'est ballot


un élastique à lance-pierre
un lance-pierre à jeter l'éponge
une éponge à tanner le cuir
un cuir de pécari à collier
un collier à scandale « Du Barry »
un Barry White «No limit of love» en vinyle
un vinyle imperméable au motif « le loup dans la forêt »
un forêt de douze à queue cône morse
un morse sans défenses
une “Défense de fumer” autocollante
un autocollant “Défense d'afficher
une affiche « Mémoires d'une geisha »
une geisha gonflable sans valve
une valve cardiaque à bille
une bille de clown
un clown gonflable avec valve
une valve de Vélib sans bouchon
un bouchon spécial goût-de-bouchon
un bouchon-fusible en bronze
un bronze signé Boucher
un Boucher par Boucher genre auto-portrait
un auto-portrait d'André Citroën
une Citroën 2CV publicitaire au 1/43e “Lait Mont Blanc
un Blanc de blanc Mouette & Chardon
un chardon à pédoncule nu
un nu-pied en cuir de pécari à collier
un second collier à scandale « Du Barry » ?

… là je me suis dit que j'étais revenu au premier bout, c'est ballot.

Seconde chance

Publié sur le site MilEtUne



C'est vraiment un fameux trois-mâts... non, quatre, quinze nœuds et mille tonneaux... rien à voir avec le Bel Espoir II de cette chanson “Santiano” que sifflotent les nouveaux arrivants.
On va partir pour de longs mois en laissant Margot, Jennifer ou Mireille avec l'espoir de ne pas nous planter sur les rochers au large du Croisic comme la fois précédente.
Saint Nicolas, protecteur des marins qui nous a sortis du néant depuis ce funeste jour de septembre 1793 nous a bien prévenus: Il n'y aura pas d'autre fois.
“Si Dieu veut toujours droit devant, vous irez jusqu’à San Francisco” a t-il promis en jurant ses mille sabords.
Comme notre saint, le commandant se prénommait Nicolas mais son nom c'était Lapin, et ça ne m'inspirait pas confiance, tonnerre de Brest!
On devrait être recalé au concours de commandant avec un nom pareil.
En plus l'Hermione s'appelait l'Hermione et ça c'était encore plus inquiétant: redonner à un rafiot le nom d'une grecque maudite par les dieux et à l'origine de la guerre de trois... alors que nos ancêtres s'étaient déjà farci la guerre de cent ans, j'appelle ça du sado-masochisme!

Comble de malheur, le nouveau maître coq avait été éliminé en saison 3 de Top Chef, aussi fut-on réduits à la portion congrue dès le départ... viande salée (lard et pieds de cochon) et un barricot de cognac Hennessy pour tout l'équipage tandis qu'au carré des officiers on se gobergeait de belles volailles de Loué et de grands crûs de saint Emilion...
Personnellement je m'en foutais un peu, j'ai toujours adoré les pieds de cochon mais les autres faisaient la gueule, surtout les femmes.
Oui, il parait qu'aujourd'hui les femmes ne portent plus malheur alors on en avait embarqué quelques unes... une sombre histoire de parité à laquelle je n'avais rien compris.
J'ai appris qu'on disait aussi matelot en parlant des femmes car la matelote est une spécialité culinaire, ce même ragoût de poissons qui avait valu au nouveau maître coq d'être éliminé en saison 3.

Bref, notre équipage mixte partait sur les traces de La Fayette, comme si on pouvait encore suivre des traces en mer 235 ans plus tard!
On n'avait pas le droit d'être contrariants, Baltimore, Philadelphie, Boston, New York... l'itinéraire semblait alléchant pourvu qu'on ait embarqué assez de pieds de cochon.
On disait même que là-bas l'argent coulait à flots et qu'on trouvait l'or au fond des ruisseaux, mais je me suis toujours méfié des réclames depuis qu'on avait dit qu'aucun bateau ne pouvait sombrer au Croisic!
Il y en a même qui disaient qu'on reviendrait au pays revoir Margot, Jennifer ou Mireille pour leur passer la bague au doigt... mais je crois que ceux-là ignoraient que le commandant s'appelait Lapin!
Je ne voyais pas l'intérêt de revenir dans un pays où la devise était devenue “Ramer plus pour gagner moins”, alors avant le départ j'ai utilisé un nouveau modèle de pigeon voyageur qui s'appelait un fax pour prévenir de mon arrivée les descendants de mon ancêtre établi - c'est marrant - à Lafayette en Louisiane dans les années 1900.
Là-bas j'allais pouvoir m'éclater, bouffer des écrevisses, du jambalaya et de l'alligator en écoutant du swamp pop avec les filles de joie... ce qu'ils appellent de l'autre côté le fameux rêve américain.
Alors j'ai été le premier volontaire pour aider à lever l'ancre... jusqu'à ce que la chaîne déconne!
Les nouveaux ont dit que c'était souvent comme ça avec la première chaîne.
En tout cas ça commençait mal...

samedi 25 avril 2015

Cinquante nuances de vert

2045, 24 auteurs imaginent demain est le fruit de la volonté de Butagaz, en partenariat avec Short Edition, de solliciter des créateurs de fiction pour mettre en scène des instants de vie, des scènes de famille à la maison... et ailleurs.







Ma recette c'est un litre de lait chaud additionné de beurre de karité et huiles essentielles de bois de rose et de lavande, mais pourquoi faut-il qu'à chaque fois que je plonge avec délectation dans ce que j'appelle ma Mer de la Sérénité, un bain à trente sept degrés... Pauline débarque?

A son claquement de porte je devine qu'elle a encore passé une mauvaise journée, à moins que la voiture sans chauffeur n'ait une fois de plus fini sa course trois rues plus loin à cause d'un bug du GPS...

Dans cinq secondes je vais avoir droit au traditionnel discours:

“J'comprends pas qu'tu t'entêtes à gâcher de l'eau pour un prix exorbitant au lieu d'utiliser notre douche sèche!”

Comme je me garderai bien de critiquer notre dernière acquisition qui m'a coûté trois mois d'heures supplémentaires, je vais supporter sans broncher la sempiternelle démonstration qui fait de mes deux cent vingt litres d'eau chaude à dix euros le mètre cube, le poste le plus énergivore de cette maison!

Il faut dire qu'il y a trente ans j'ai eu l'honneur d'épouser la reine de la sobriété énergétique, la chasseuse de gaspi par excellence.

Si je vous dis que son livre de chevet c'est le Protocole de Kyoto, deux cent cinquante quatre pages et pas une image!

Je l'appelle son “Cinquante nuances de vert” mais ça ne la fait pas rire, bien au contraire; j'ai droit en retour à un cours sur l'équivalence carbone du support papier, et croyez-moi ça vaut une berceuse.

Voilà quarante ans qu'avant de s'endormir Pauline en lit une page à la lueur d'une lampe-loupe frontale à led bleue collée sur le crâne comme une grotesque luciole.

Allez donc faire l'amour à une schtroumpfette cyclope!

Je ne sais pas pour vous, mais moi l'Advanced Focus System format seize neuvième, ça me coupe mes effets. Et en plus, imaginez que ça fasse webcam? Je n'ose y penser...


La porte de la salle de bains ne s'est pas ouverte, et je n'ai pas eu droit au traditionnel discours ni à la démonstration qui tue.

Tout ça n'est pas normal, alors je lance mon célèbre “Tout va bien, chérie?”

Pas de réponse... la reine de la sobriété énergétique se serait-elle mise en mode veille comme tout ce qui possède une prise de courant dans cette maison?

Je sors à regret de la Mer de la Sérénité, essaie de débrancher mon peignoir chauffant, m'énerve, renonce à cette merveille technologique pour débouler nu comme un ver dans le salon.



Hébétée, Pauline est figée devant le mur d'images: “Enfin! J'le crois pas, depuis l'temps qu'le maire nous promettait que le lotissement serait alimenté en gaz de schisme!”

Inconscient du risque pris, je rectifie: “Gaz de schiste ma chérie, le schisme c'est un conflit au sein d'une églis...”

“C'est bien c'que j'disais! Entre çui qui veut, çui qui veut pas et toutes leurs querelles de clocher... si c'est pas du schisme, ça!”

Je n'insiste pas et fais demi-tour.

“Tu f'rais bien d'aller enfiler un slip” me lance t-elle sans un regard. Comment fait-elle ça?



Direction la lingerie où le lave-linge fait un vacarme d'enfer, comme d'habitude.

Relancer cette polémique serait la polémique de trop: Laver le linge à froid, d'accord mais de là à y ajouter des glaçons!

J'enfile un slip gelé mais propre: “Donc tu disais que le maire s'est enfin ouvert aux énergies modernes?”

J'aurais dû m'attendre à cette réponse: “J't'entends pas avec tout c'bruit! Ferme les portes, bon sang!”

Je passe un jean gelé mais propre avant de fermer la porte: “Quand est-ce qu'on passe à ton gaz de schisme?”

“C'est pas d'main la veille vu qu'les ruskovs font la gueule comme toujours et qu'les yankees explosent les prix, mais y z'ont commencé à creuser dans not' rue!”

La mauvais humeur doit venir de là... le GPS n'aura pas intégré les travaux.

“Ah? On va encore utiliser notre éolienne pour un temps, alors?”

“Ouais! A propos d'éolienne, j'sais pas qui avait débranché l'ventilo la nuit dernière, mais j'me suis maquillée à la bougie c'matin!!”

Il faut dire que dans l'impasse où nous vivons il n'y a jamais eu de vent - même lors de la fameuse tempête de 99 - et que ma reine de la sobriété énergétique m'a forcé à installer un gigantesque ventilateur en face de notre éolienne, lui-même alimenté par l'éolienne ce qui fait que... non, pas cette polémique, d'autant qu'il n'y a pas de bougie dans cette maison à part des bougies d'anniversaire Mollacell trop souvent déchargées.



“Euh... ça doit être Mathis qui aura trifouillé la domotique dans le noir”

Pauline déboule, survoltée: “Comment ça dans l'noir? Ça sert à quoi que j'vous équipe tous en led bleue frontale?”

“Chérie, quand tu avais son âge tu rentrais de boîte de nuit dans le noir et sans...”

“Ouais mais ça c'était avant!”

J'ose un “Avant quoi?” qui est le parfait exemple de déclencheur de polémique.

“Arrête avec ça... j'ai eu une journée d'merde au bureau et j'ai envie d'décompresser... ton bain est toujours chaud?”

Celle-là, je l'attendais.

Ma reine de la sobriété énergétique daigne finalement partager ma Mer de la Sérénité à dix euros le mètre cube, dut-elle renier ses sacro-saints principes.

Si l'effet papillon existe encore, la terre doit trembler à Kyoto!

Sourire en coin, je consens à la suivre au bord de ma Mer laiteuse où elle me gratifie d'un strip-tease rapide avant de s'immerger.

“Tu veux que je te frotte le dos?”

Le chignon en périscope, Pauline joue au grand bleu et échappe à ma main baladeuse jusqu'à ce qu'elle émerge en toussant et crachant: “Qu'est-ce que t'a foutu là d'dans?”

“Comme d'hab chérie, un litre de lait, beurre de karité et huiles essentielles!”

“T'es givré? Du lait entier! T'as calculé combien ça coûte ta mixture? Sans compter la pollution quand t'auras tiré la bombe”

“Euh... la bonde chérie, pas la bombe”

Les mains sur les hanches, elle exulte. J'aime bien quand elle exulte nue, avec son chignon dressé et ses petits seins tout pareil.

“C'est bien c'que j'disais! La bombe, on l'aura sur not' prochain relevé bancaire, Môssieur”.

J'aime quand elle m'appelle Môssieur parce que ça ne dure jamais très longtemps.

Au prix d'un effort surhumain je réussis à débrancher mon peignoir chauffant et lui offre tout chaud avec un sourire charmeur.

“Merci Môssieur” minaude t elle en s'y glissant voluptueusement.

Le Môssieur l'emporte dans ses bras pour se diriger vers la chambre quand la porte claque à nouveau.

C'est Mathis, notre fils: “C'est quoi cette p..... de trachée en haut de la rue? J'ai failli me viander!!”

Je repose au sol ma reine de sobriété énergétique qui possède la réponse pour ça.

“C'est la trachée du progrès, mon grand. Le gaz de schisme des Ricains fera bientôt son entrée dans notre maison!”

Va pour trachée aussi, je ne relèverai pas, Pauline est si chaude contre moi.

Vegas sur sarthe



Les clés du 36

Publié aux Défis Du Samedi


“Allo Ouatson? Cette enquête sur le cambriolage du Bureau des objets trouvés... ça avance?”
“Euh... on a pris du retard inspecteur. Vous connaissez pas la dernière?”
L'expression 'Vous connaissez pas la dernière' fait partie des phrases qui ont valu à l'inspecteur La Bavure un traitement de choc anti-stress: “Dites toujours mon vieux”.
“Et bien figurez-vous que ces ploucs avaient perdu les clés du Bureau des objets trouvés!”
(Soupir)
“Et alors?"
“Et bien quelqu'un les a trouvées et rapportées mais ils pouvaient pas les accepter puisque le Bureau était fermé à clé alors j'ai eu l'idée d'essayer les nôtres - celles du 36 quai des Oeufs Frais - puisqu'ils sont au 36 rue des Morillons, alors je me suis dit qu'entre 36 on pouvait...”
“Arrêtez mon vieux. Cette enquête, ça prend tournure?”
“Une belle tournure inspecteur. Ouatelse et moi-même avons commencé par l'historique de la rue des Morillons. Savez-vous que les morillons étaient des petits raisins noirs récoltés dans les vignes de Vaugirard et qui...”
“Ca suffit mon vieux. On n'est pas là pour les vendanges! Quoi d'autre?”
“Très intéressant, inspecteur. A quelques centaines de mètres de là se trouve l'église saint Antoine de Padoue!”
“Et alors? Vous allez à la messe pendant l'service?”
“Non. Saint Antoine c'est celui qui aide à retrouver les objets perdus! C'est marrant, non?”
“Bon Dieu, vous avez que dalle sur le cambriolage?”
“Euh... si, inspecteur. D'après l'inventaire il y aurait plus d'objets après le cambriolage qu'avant le cambriolage! C'est dingue, non?”
“C'est quoi c't'histoire? Les voleurs apportent des trucs, maint'nant??”
“Attendez, Ouatelse m'a fait une liste que j'ai... que j'ai perdue. Faudra que je lui demande de m'en refaire une à l'occasion”
“Pourquoi elle est pas avec vous?”
“Euh... Ouatelse est juste en face, au parc Georges Brassens”
“Qu'est-ce qu'elle branle au parc? Elle bronze ou elle est partie s'bécotter sur les bancs publics?”
“Non. Elle suit les traces, inspecteur... des traces de pneus”
(Soupir)
“Allez-y, mon vieux... j'peux tout entendre”
“Les types étaient à vélo ou à trottinette - on sait pas encore - alors Ouatelse est sur leurs traces”
“Et vous pensez trouver quelque chose deux semaines après les faits? Vous débloquez mon vieux! Et dans l'Bureau c'était comment?”
“Euh... Bien rangé inspecteur. Les robes de mariée avec les robes de mariée, les prothèses avec les prothèses, par contre j'aurais pas mis les statuettes religieuses avec les vibromasseurs... mais ça c'est un choix purement...”
“Abrégez mon vieux! J'vous d'mande juste si c'était le souk ou pas et quels indices vous avez pu recueillir?”
“Le premier indice inspecteur, c'est que les clés de notre 36 rentrent bien dans la serrure de leur 36!”
(Soupir)
“Bon Dieu, on a du mouron à s'faire côté sécurité de l'état-major!! A part ça?”
“Je me souviens des objets trouvés en trop, inspecteur: c'étaient deux masques de vélo et une pompe à Mickey”
“Vous êtes sûr de ça?”
“Excusez, inspecteur. C'étaient deux masques de Mickey et une pompe à vélo”
“Deux cyclistes masqués! On progresse, Ouatson... on progresse. Allez récupérer Ouatelse et rentrez fissa”
“On abandonne les recherches, inspecteur?”
(Soupir)
“Ouatson! On dit abandonner quand on a commencé quelque chose...”
“Euh... pour les masques et la pompe, inspecteur... on se demandait avec Ouatelse si c'était considéré comme des objets perdus ou des objets trouvés?”
“Qu'est-ce que ça peut bien vous foutre?”
“C'est rapport à l'enregistrement sur les registres, inspecteur”
(Soupir de fin)









samedi 18 avril 2015

Tirades du nez connecté

Publié sur le site MilEtUne d'après l'illustration



Eminent:
Entre rose et putois s'il me faut discerner
il n'est meilleur outil que le bout de mon nez

Irréductible:
Parmi tous ces capteurs électro-cutanés
s'il doit n'en rester qu'un je suis le dernier nez

Prudent:
Au fumet répugnant du puant animal
je remets à zéro mon hexadécimal

Exalté:
Au bouquet capiteux d'une rose d'été
j'ouvre mes récepteurs au risque d'éclater

Sophistiqué:
De nanobiosensors je suis suréquipé
et les doigts dans le nez vous pouvez me biper

Connecté:
Je vous épargnerai tous les menus détails
pour les puces à tarin... allez sur le portail




MST Option Blanc cass'

Quand les Défis Du Samedi me demandent d'évoquer une remise de diplôme, je sors ce que j'appelle 'mes Bourguignonneries'...




Quand Oncle Hubert nous réunit pour nous annoncer qu'il avait décroché une MST, on eut d'abord un mouvement de recul comme si un pestiféré débarquait dans la famille.

Cheu nous autres, on n'était jamais malade à part peut-être une fois quand le pépé avait eu sa drouille galopante à cause d'une orgie de pêches de vigne traitées anti-mildiou!

Quand Oncle Hubert a ajouté qu'il avait bien mérité sa MST, on a eu un second mouvement de recul en nous demandant bien ce qu'il allait dire pour sa défense et surtout si tante Anastazia était au courant des détails?

Quelle pouvait être la réaction d'une polonaise présentement occupée à la préparation d'un bortch aux haricots sur le délicat sujet d'une infection sournoisement contractée lors d'une chaleur extra-conjugale?

Il ne pouvait pas avoir berdauillé cette gouine de Rolande, ni la grosse Margot et ses relève-titi... donc, c'était la mère Fromageot, celle qui tenait l'écluse n°33 ?

Un troisième recul nous eut flanqués dans l'arrière-cuisine mais comme notre Oncle brandissait nerveusement quelques feuillets - sans doute les résultats d'un récent dépistage du sida - une des pages tomba, vivement ramassée par p'tit Louis.

Ça cause de nononque!” s'écria t-il crânement.



S'étant étranglé sur les cinq premiers mot “Cé-avec-une-im-mensse-zoie” je lui arrachai la page des mains en me raclant la gorge pour dénoncer l'infamie à haute et intelligible voix, et je lus:

C'est avec une immense joie, et beaucoup de fierté, que nous vous annonçons que vous venez d'obtenir avec succès votre Maîtrise d'histoire des Sciences et Techniques option Blanc cass'.

Afin de marquer ce moment important de la vie qu’est la fin de la période étudiante, une cérémonie de remise de diplôme est organisée le 18 avril 2015 à 16 heures à l'annexe de la mairie de Fouzy-sur-Bèze.

Elle sera suivie fort à propos d'un cocktail que n'aurait pas renié Félix Kir, notre célèbre chanoine et inspirateur de votre brillante thèse”.



J'avais tout lu d'une traite sans respirer et comme p'tit Louis demandait ce qu'était une option blancasse, la réponse arriva sous la forme d'une Master-calotte que lui administra Maître es Blanc cass' en personne!

Un bregognon pure souche pouvait -il ignorer ce qu'est un blanc cass', ne fusse qu'un drouilloux de cinq ans?

Je me souvenais avoir dû apprendre par coeur les proportions et les densités d'alcool du rince-cochon et même celles du 'Double K' créé pour la rencontre entre Nikita Khrouchtchev et le Chanoine Kir dans les années 60 (2 cl de crème de cassis, 4 cl d’Aligoté et 4 cl de Vodka)...

Tandis que p'tit Louis chouinait sur son ignorance, un immense soupir de soulagement souleva notre groupe... oubliées les Rolande, Margot et jusqu'à la mère Fromageot!

Tante Anastazia - du bortch plein les mains - était aux anges c'est à dire empressée à dégainer cette wodka frelatée coupée au méthanol qu'elle gardait pour les grandes occasions...

Ainsi nous avions un étudiant dans la famille, un étudiant de soixante balais et très mal fagotté mais très diplômé!

C'étaient donc ça ces soirées passées à aligner sur la table toutes ces fillettes de Chablis, de Meursault, à treuiller les cassis au pressoir, à se gargariser jusqu'à point d'heure et à ronfler chaque nuit comme une 241-P en gare de Dijon?

Tout ça pour décrocher une MST et aller faire le beau à l'annexe de la mairie de Fouzy-sur-Bèze samedi prochain!

De mémoire, je n'avais jamais vu autre chose que des Certificats d'Etudes primaires dans la famille et mise à part la “petite” croix de guerre du pépé en 14, on ne brillait pas en distinctions vu qu'on ne faisait pas de vieux os sur les bancs de l'école communale.



Oncle Hubert rayonnait: ”Tu repasseras mes culottes” lança t-il à Anastazia d'un air suffisant, l'air que prendrait dorénavant celui à qui elle s'adresserait en disant Maître et en tortillant son devantier.

P'tit Louis se fraya un passage dans le groupe pour toucher Le Maître: ”Alors nononque... t'es pas malade?” bredouilla t-il.

L'énorme rire d'Oncle Hubert nous plaqua définitivement au buffet où Anastazia servait des galopins de son infâme tord-boyaux.

Malgré l'heure tardive il nous restait à battre - les mains tournant en forme de coupe à hauteur du visage - notre traditionnel ban bourguignon «Tra, la, la, la, la, la, la, la, la, lère»...

Si nous allions être au plus mal dans une heure, Oncle Hubert n'était pas malade.




lundi 13 avril 2015

(bonne) Poire ou éconduire, il faut choisir

Rainette surprise à Brocéliande 07/2012




Lassée de son échelle à prévoir le climat
une rainette verte s'en vient d'humeur morose,
au jardin où fleurit la plus belle des roses
lui suggérant la chose en tout anonymat.

Notre crooner des mares - à force décibels -
connaissant la chanson sur le bout des pelotes
dilate son organe et propose la botte
à la reine des fleurs, une pourpre Isabelle.

En roi de l'escalade il voudrait la grimper
et saisir aux aisselles la belle épanouie
qui devant tant d'ardeur se pâme, s'évanouit.

Dans son kamasutra il n'a que l'amplexus,
de l'amour elle ignore jusqu'aux rimes en sus,
l'envoyer sur les roses ne saura le stopper...

dimanche 12 avril 2015

Rêve magique

Publié sur le site MilEtUne d'après les peintures oniriques de Rob Gonsalves



Alors le firmament d'un velours azur s'est déchiré, découvrant des nuages en prière.
A cet instant j'ai décollé, quitté la courtepointe mosaïque de mon lit douillet.
Sous moi j'ai vu l'échiquier du monde et ses tours infernales, ses bâtisses volumineuses hautes comme trois tomes.
Au loin une cascade blanche comme l'aube coulait en draperies. Plus loin encore, un auditoire de tournesols tanguait au son d'un... était-ce un violon ou une trompette?
Parfois la nuit magique trompe l'oeil et l'oreille aussi.

samedi 11 avril 2015

Rififi à La Fontaine

Publié aux Défis Du Samedi qui se demandent ce que deviennent les piécettes
jetées dans les fontaines  ?




La Galeci, ayant pillé
Tout l'été,
Se trouva en garde à vue
Quand la crise fut venue:
Pas une seule piécette
aux cabinets, aux tinettes.
Elle alla crier Justice
Chez la Mifour, Qué Pastis!
Exigeant qu'à la fontaine
On balance sous huitaine
Du grisbi en abondance.
"Croyez-en mon expérience,
J'vous renverrai l'ascenseur,
le beurre et l'argent du beurre."

La Mifour est suspicieuse
C'est là son moindre travers.
“C'est quoi t'est-ce, ce revolver?”
Dit-elle à cette vicieuse.
- Ce n'est qu'un Smith & Wesson
qui n'a dessoudé personne.
- J'aime bien ceux qui innovent
Marre de la kalachnikov.


mardi 7 avril 2015

Métaplasme et tais-toi!

image générée grâce au site "Un titre"
crédit photo Ernesto Timor




Je rêvais de liaisons polissonnes, érotiques
pas-z-à pas, mot-t-à mot j'espérais l'envoûter
par d'habiles phonèmes que j'avais testés
mais dans l'antre des mots couvait la faune éthique.

J'ai compris que j'avais-z-abusé des hiatus
quand-t-elle m'a repris – soudain – la bouche en coeur
j'étais trop-p-excité et trop-p- alambiqueur
alors entre quat-z-yeux elle brailla “Motus!”

Je restai interdit sur ma finale muette
quand elle m'ordonna de la caramboler
et d’un commun-n-accord on-n-a batifolé.

Elle eut des e caducs et moi des pataquès
des sortes de vas-z-y, des-z-encore et des qu'est-ce?
oui mais jusque-z-à quand... je craignais pour ma luette.







(*) En phonétique, la liaison est une forme de paragoge, un métaplasme (modification phonétique qui altère l'intégrité d'un mot)