Aujourd'hui j'ai rencontré le six
heures douze.
Il était pile à l'heure et ça m'arrangeait car je n'aurais pas supporté
d'attendre plus longtemps. Je l'avais souvent raté mais pas cette fois-ci.
J'avoue que j'avais peur mais je n'ai pas eu mal, enfin guère plus que les
autres jours, depuis qu'elle est partie avec l'autre.
Je l'avais rencontrée dans le train - c'est drôle ça - le dix neuf heures
huit, celui des gens tristes qui rentrent de Nantes après leur journée de travail.
C'était la première fois que je rencontrais quelqu'un, enfin quelqu'un qui
mérite qu'on s'y attache.
Tous les autres, mâles ou femelles, je les oubliais dans la minute qui
suivait mais pas Elle.
Très vite, trop vite j'ai tout su d'Elle, enfin je l'ai cru jusqu'à ce
jour... le jour où le dix neuf heures huit l'a ramenée en compagnie de ce type vulgaire.
C'est quoi tous ces gens autour de moi? Qu'est-ce qu'ils
attendent?
Le six heures douze est arrêté en pleine voie et il n'est pas prêt de
repartir.
Il faudra qu'ils soient patients, sous les roues j'ai laissé pas mal de
moi, des choses inutiles à présent.
Dans les haut-parleurs ça parle d'un accident de personne...
C'est ça, on peut dire personne. C'est comme ça qu'Elle peut m'appeler
maintenant.
Il doit être six heures trente, l'heure où Elle a l'habitude de se
lever.
Elle aura les cheveux en désordre et son étrange regard de chien
battu.
Sans doute va t'il la retenir au lit? Moi, c'est ce que j'aurais
fait.
Elle manquera un train ou deux, ou plus, de toute manière je sais qu'il y
aura du retard ce matin.
J'ai bien fichu la pagaille, mais c'est lui qui avait
commencé!
Je sens qu'on me soulève maladroitement. On doit pas savoir par quel bout
me prendre. On m'emporte.
Elle n'en saura rien. Les faits divers, c'est pas son truc...
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