A partir de cinq mots énigmatiques, étoffés de nombreux témoignages recueillis sur le terrain, j'ai pu reconstituer cet
émouvant épisode d'un passé à la fois simple et compliqué.
Publié aux Impromptus Littéraires avec l'aimable autorisation de moi-même
Anoux-La-Motte, le 12 juillet 1947
Très cher John - alias Mac Aaron,
Je
caresse l'espoir - à défaut d'autre chose - d'une infime
chance que vous reveniez un jour dans ce qui fut le théâtre de notre
merveilleuse aventure et où je cache aujourd'hui cet aveu.
Tant d'années ont passé depuis cette magique nuit du 15 août où, tandis que la vierge Marie montait
au ciel - comme chaque 15 août - vous vous empalâtes, votre parachute et vous sur la pointe impitoyable de notre petit nid d'amour, ayant confusément pris
pour signal mon pauvre lumignon! (Sorry)
Pour
une fois que mes anglais débarquaient dans la joie, je vous recueillis,
vous soignai et je mis
tant d'empressement à vous remettre sur pied que votre blessure ne
fut bientôt plus qu'un croustillant sujet de plaisanterie entre nous.
Vous me mîtes au parfum (naphtaline), vous disant agent double
et je l'ai cru sans peine car dans nos torrides ébats, j'ai toujours pensé que vous étiez plusieurs.
Quelle idée saugrenue d'avoir choisi macaroon comme nom de guerre! Je vous avais bien vite
rebaptisé croquembouche et vous ne vous en plaignîtes jamais, bien au contraire, vous le revendichat
revendiquâtes même.
De la Force Rugby de votre général Frederick, je ne me souviens que de nos ardentes mêlées et de
vos essais brillamment transformés.
Quand j'y repense aujourd'hui ma gorge me manque et les mots se serrent, à moins que ce ne soit
l'inverse :
Vous aimiez mon accent et mes alexandrins,
moi votre torse roux et votre beau man...
vous m'apprîtes vos mots et le nec-plus-ultra
tant de pages cornées dans le kama-su...
Nus, sous le firmament on criait "Fuck the war"
et bien qu'il fut trop tôt pour compter vous ass...
à force d'inventer, des merveilles vous fîtes
pour moi c'était le pied, pour nous deux c'était ...
Plus tard ont débarqué les fruits de nos folies que j'ai baptisé Brian et Helmut et qui ignorent
tout de vous puisque j'ai consenti à faire voeu de silence.
Cependant je n'ai jamais juré de ne pas écrire... c'est aujourd'hui chose toit faîte!
Votre petite provençale
P.S: Le passé simple n'étant pas aussi simple qu'on veut bien le faire croire, je joins ici
un petit lexique à usage des non francophones:
- empalâtes: même au passé, vient du verbe empaler
- mîtes: lépidoptères à chapeau chinois
- revendiquâtes: (franglais) se dit après avoir revendu le chat
- fîtes: du verbe "faire des pieds" mais pas des mains
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