lundi 14 janvier 2013

La tournée du jeudi

Publié aux Impromptus Littéraires en hommage à ma trottinette, aux catherinettes et Tutti-quanti...
 
 
 
 
J'suis certain du jour passeque c'était celui des catherinettes, le 25 novembre quand ma frangine a dû porter cet affreux galure aux couleurs merdiques qu'on aurait dit une tartelette au Roquefort de chez Faux-j'ton - mon vieux dit Faux-j'ton mais c'est Fauchon - et même qu'elle l'a gardé toute la journée, rapport à la tradition.
C'est bien l'seul jour où j'l'ai pas vue ram'ner un mec à la maison, preuve que la couleur d'un galure ça vous attire les michtons ou ça vous les fait fuir!
J'ai pas à m'plaindre, les types à ma frangine ont toujours été sympa avec mézigue, c'est un peu comme des grands frérots sauf qu'on a jamais l'temps d'sympathiser vu qu'ma frangine saute du Coca halal.
 
Dans son tableau d'chasse y a eu un trapéziste, deux boxeurs mais pas en même temps, un maraîcher qui vendait des pruneaux à jeun et pis y'a eu l'trompettiste, çui qu'elle appelait Dizzy mais j'y ai pas dit grand chose vu qu'y passait ses journées à trompetter et à nous casser les esgourdes avec son instrument; encore heureux qu'la nuit y mettait la sourdine au piston ou c'est ma frangine qui lui mettait... enfin c'est pas mes oignons.
 
Donc ce jour-là j'avais rancard avec Paulo - non pas passeque c'était le 25 novembre mais passeque c'était jeudi, jour de la tournée.
A l'époque on avait congé l'jeudi et c'qu'on appelait faire la tournée c'était prendre nos trottinettes et faire toutes les salles de ciné de Place Blanche à Barbès à la recherche d'une issue d'secours ouverte.
Le plus souvent on entrait au Wepler - on appelait ça faire du pathé - et on reluquait tout c'qui s'passait, aussi bien dans la salle comme sur l'écran vu que comme on choisissait jamais l'film c'était souvent plus instructif dans la salle...
 
Sauf que c'jour-là, le fameux 25 novembre y avait les condés dans la salle et on a fini la séance au commissariat du 9ème avec les bracelets, quelques coups de pied au cul et j'vous passe l'accueil sur place avec le planton, le chef de poste et Tutti-quanti - l'inspecteur principal à l'accent italien - que Paulo devait connaître et appelait par son nom.
Après l'sermon de Tutti-quanti c'est nos vieux qui sont v'nus nous causer du pays mais j'ai pas envie d'en parler.
Pendant un temps ma frangine a passé pour une sainte et moi pour un malfrat d'première, jusqu'à c'qu'elle parte ouvrir un salon d'massage rue saint Denis... une proposition léchante à c'qu'elle a dit.
Mon vieux disait que c'était pour assurer ses arrières et ça m'étonne pas vu que l'devant risquait plus rien.
 
Depuis qu'elle a mis les bouts j'ai une paix royale, plus de trottinette mais une vraie passion pour le cinoche. 

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