Publié aux Impromptus Littéraires
"La région du Pied-mont est propice aux
excursions pédestres tout comme l'ensemble de la botte italienne".
C'est ainsi que parlait Sarah Toustra - la guide du syndicat
d'initiative - à notre petit groupe baptisé Les Mocassins, fraîchement
débarqué à la gare de Turin et qui croyait bêtement trouver du
jambon à Aoste.
Cette semaine de vacances supplémentaire promettait d'être riche en émotions.
Notre
première émotion due à une overdose de
carota grattugiata - des carottes râpées - eut raison de notre
transit digestif et on peut dire qu'on en a chié pour passer le Pô.
C'est un marabout de Corda - ficelle en français - qui nous a remis
en selle en nous faisant prier au pied des stalles d'une tour située
Place des Miracles et qui d'après moi penchait
vachement.
On
avait prévu de rejoindre Florence - pas
la ville - une copine basque qui s'était fourrée dans un gai pied en
quittant son job de podologue à saint-jean-pied-de-port pour suivre un
homo podophile; j'ai découvert plus tard qu'un
podophile n'est qu'un fétichiste du pied, même en italien. On n'a
pas vu Florence, alors on a vu Parme comme le chante un certain
Berliscuno, le Brel local.
Voyez-vous, Parme ça ressemble beaucoup à Aoste, surtout les charcuteries.
Au loin on apercevait le sommet escarpin - la guide disait escarpé -
du Mocassin; les italiens disent le Mont Cassino bien qu'on y trouve
pas la moindre machine à sous. Finalement ça fait
beaucoup de marche pour rien quand on prend les noms au pied de la
lettre.
Alfredo a dit comme ça que ça nous faisait les pieds; ça a fait
pleurer Britney qui trépignait et ne voulait plus continuer.
Heureusement on a fait tourner la grole à huit becs remplie de gnôle
locale qui a requinqué tout le groupe. Je ne sais pas pourquoi
requinquer se dit tourista en italien, enfin bref.
Alfredo voulait voir le Monte di Pieta - le
Mont de Piété - mais on l'a jamais trouvé sur la carte; on était pourtant venus pour découvrir les spécialités italiennes.
Alors on est redescendus en lacets dans la vallée en traînant la
semelle; Johnny fermait la marche, fier de porter sa musette et son
surnom de Dernier des Mocassins. Il faisait déjà nuit mais
avec nos ampoules on devinait bien nos pieds.
Il nous restait encore à voir Naples et ses ateliers de chaussures,
là où parait-il à l'ombre du Vésuve travaillent des picciotti douze
heures par jour... finalement on n'a pas eu envie d'acheter
et comme on s'est fait racketter nos pompes à la gare par des
mafiosi, on a pu voyager les doigts de pieds en éventail jusqu'à la
frontière française.
On nous a dit plus tard que c'était la
camora, qui aussi bizarre que ça paraisse n'en voulait pas du tout à nos appareils photo... un sacré pied de nez à la mafia!
A Chambéry on a filé au premier magasin de pompes venu: c'était un
Sport-Vingt-Mille où on n'a trouvé que des moon boots pointure quarante
six, mais qu'est ce que c'est le pied, même en plein
mois d'Août!
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