Publié aux Défis Du Samedi d'après l'illustration
Le
sous-sol de la maison de son aïeul tenait plus de la caverne d'Ali
Baba que d'un atelier de peintre.
Il
était temps pour Pablo de faire le grand ménage dans ce bric à
brac.
Il
s'était débarrassé de l'éternelle vareuse bleu turquoise qui le
quittait rarement; c'est alors qu'entre deux esquisses sans grande
valeur il avait aperçu l'étonnante composition: une miniature
exécutée à la tempera sur un panneau de pin.
Pablo
l'approcha d'un soupirail où la lumière d'un franc soleil pénétra
à travers les couches de couleurs, faisant briller les glacis d'un
éclat extraordinaire.
Ce
vieux maniaque aurait appliqué à la lettre tous les secrets de
l'émulsion retranscris d'une fine écriture dans ce petit carnet que
Pablo venait de découvrir?
Les
couleurs pures faites de pigments mélangés au liant à l'oeuf et
passées les unes par dessus les autres au lieu de s'entretuer
apportaient un effet lumineux haut en couleurs.
Pourtant
l'oeuvre semblait enfantine comme si un apprenti-Caravage en culottes
courtes avait été rompu à cette technique malgré son jeune âge.
Comme
il y cherchait une signature il retourna le tableautin et il le vit !
C'était
un fond abyssal d'un noir ultra-noir, un rectangle si sombre que
Pablo en perdit toute notion de lieu et de temps.
Jamais
il n'aurait dû le fixer si longtemps à l'oeil nu, mais longtemps ne
signifiait déjà plus rien.
Jamais
il n'aurait dû y poser le doigt, offrir ses mains, ses bras à ce
noir qui l'aspirait.
Le
sous-sol de la vieille maison ressemblait à une caverne d'Ali Baba.
On
y retrouva parmi de vieux cadres défraîchis une étrange vareuse
bleue turquoise et un petit carnet vierge...
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