Publié aux Impromptus Littéraires sur le thème renouvelé : J'ai changé de sexe
Je
me suis surprise à trouver grotesque cette feuille de vigne qu'il
arborait avec ostentation et tellement déplacée par rapport aux
loup-bouquetins qui lui faisaient tordre les chevilles à chaque
pas...
Je
m'étais réfugiée derrière le seul banc qui meublait l'Eden Park,
pas encore habituée à cette nouvelle tenue d'Eve dénuée de tout
accessoire.
Ah
IL ne s'était pas foulé pour mon déguisement, celui qui faisait la
pluie et le beau temps au dessus de nos têtes et si je n'avais pas
subitement développé une toison aussi incongrue que providentielle,
je me serais vraiment crue à poils !
Comme
je cherchais de quoi bricoler un coeur croisé de latex pour mes
nouveaux roberts je saisis une grosse branche souple et tortueuse qui
s'avéra être un serpent. Une fois les présentations expédiées
j'aidai mon nouveau pote Satan à chiper quelques figues dans l'arbre
de la Connaissance et on en croqua tous les trois, Satan, ma pomme
c'est à dire Adam et la tarlouze à la feuille de vigne.
Là-haut,
IL avait fini de se marrer et sa sentence tomba comme un coup de
tonnerre : Le travelo allait devoir travailler à la sueur de son
front et moi j'allais devoir enfanter dans la douleur !
Enfanter
? Nom de Dieu, IL avait dit quoi, là ? J 'entravais que dalle à son
histoire.
La
tarlouze était mort de rire; il s'est mis à chanter un truc
zarbi... ça faisait :
"Eve
lève-toi tes enfants ont grandi
En
donnant la vie je serai comme toi"
Je
commençais à comprendre. J'allais vomir... non, pas déjà.
J'imaginais que les vomissements viendraient plus tard, et les
vergetures aussi.
Je
levai la tête, il fallait qu'IL m'explique, qu'IL arrête cette
mascarade, qu'IL me rende ma virilité.
J'ai
crié bien fort : "Je suis d'accord pour la conception mais pas
pour toutes ces conneries !"
IL
restait muet.
J'ai
encore crié : "Explique-toi... Accouche !"
La
voix céleste a répondu en écho : "Toi même"
J'ai
repris mes esprits sur mon banc, le seul banc qui meublait l'Eden
Park; deux pigeons idiots forniquaient contre ma hanche.
Je
les ai chassés d'un revers de main; j'avais retrouvé ma force, mes
muscles, la sueur sur mon front.
L'un
des pigeons idiots s'est excusé bêtement : "C'est LUI qui nous
a dit... Croissez et multipliez-vous"
Multipliez-vous.
J'ai eu un sourire narquois. J'avais du pain sur la planche.
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