Publié aux Défis Du Samedi sur le thème: Tradition
La
coutume des haricots consistait à équeuter une montagne de gousses
que le papi répartissait par grosses poignées entre nous tous -
cousins et cousines - jeunes volontaires désignés d'office.
Papi Marcel se réservait la tâche honorifique et tarabiscotée de les
ranger verticalement - une fois équeutés - tels des petits soldats
dans un régiment de bocaux à l'alignement millimétré.
En
ronchonnant, chacun castrait son “mangetout” par les deux bouts,
retirant un fil, recoupant les plus longs à la taille réglementaire
sans les esquinter en se dépêchant lentement pour éviter
une poignée de haricots supplémentaire.
Le
papi ne jurait que par le Contender... “De la bonne graine”
disait-il “ à l'inverse de vous!”.
Quand on est gamin et qu'on s'apprête à vivre les traditionnels mois de vacances dans la grande maison de famille bourguignonne posée à deux pas d'adulte du Canal du même nom - soit quatre ou cinq pas d'enfant - il y a de quoi être soucieux.
Le rituel dominical consistait à traverser les deux ponts pour jarter jusqu'à l'église située en haut du village avant le dernier coup de cloche et sans salir nos beaux habits.
Quand on est gamin et qu'on s'apprête à vivre les traditionnels mois de vacances dans la grande maison de famille bourguignonne posée à deux pas d'adulte du Canal du même nom - soit quatre ou cinq pas d'enfant - il y a de quoi être soucieux.
Le rituel dominical consistait à traverser les deux ponts pour jarter jusqu'à l'église située en haut du village avant le dernier coup de cloche et sans salir nos beaux habits.
Mamie Jeanne rêvait d'un autre habit pour nous... soutane pour un garçon
ou voile pour une fille mais la vocation ça ne vient pas toujours
dans un missel garni d'images de communiants et le Patron - figé sur
sa Croix et contraint de subir les sermons déjantés d'un curé
loufoque - n'embaucha guère plus que quelques espiègles enfants de
choeur.
L'usage du coucher consistait à entamer une seconde journée faite de batailles de polochons et diverses embistrouilles, et tout ceci à tâtons puisque l'ingénieux papi avait inventé l'extinction des feux télécommandée au moyen d'un interrupteur traîtreusement disposé vers sa chambre.
La traditionnelle pêche à la ligne était parmi les corvées les plus douces puisqu'en quelques secondes nous posions pliants, bourriches et épuisettes sur la berge devant la maison.
L'usage du coucher consistait à entamer une seconde journée faite de batailles de polochons et diverses embistrouilles, et tout ceci à tâtons puisque l'ingénieux papi avait inventé l'extinction des feux télécommandée au moyen d'un interrupteur traîtreusement disposé vers sa chambre.
La traditionnelle pêche à la ligne était parmi les corvées les plus douces puisqu'en quelques secondes nous posions pliants, bourriches et épuisettes sur la berge devant la maison.
Armés
de patience et de fourbes hameçons, nous taquinions tout ce qu'il y
avait à taquiner entre deux passages de péniches chargées à ras
bord et qui déclenchaient des tsunamis couleur café-au-lait où
disparaissaient nos bouchons dans des relents vaseux qui viaunaient
le gasoil...
Quand on est gamin et qu'on s'accroche la serviette autour du cou pour une de ces rituelles orgies qui s'étirent presque jusqu'à l'heure du souper sans pouvoir officiellement quitter la table, il y a de quoi être soucieux.
Quand on est gamin et qu'on s'accroche la serviette autour du cou pour une de ces rituelles orgies qui s'étirent presque jusqu'à l'heure du souper sans pouvoir officiellement quitter la table, il y a de quoi être soucieux.
On
vous y gueude au pâté en croûte, vous torture aux escargots
persillés, vous condamne au doublé poisson-viandes avant les
tourments salade-fromage-dessert tout en vous promettant aux calendes
grecques ce fameux galopin de Ruchottes-Chambertin dont les
grands se gobergent.
Pour
peu que l'orgie dégénère on vous forcera à chanter en public
l'immuable et planétaire classique de Guy Béart “Ma petite est
comme l´eau, elle est comme l´eau vive, Na na nère...”
Pourquoi
tant d'eau au pays du pinot noir?
La fin des vacances arrivait à grands pas - sonnant la fin des réjouissances - alors, au risque d'attraper la drouille et une tisane on sacrifiait à Notre tradition, celle qui ne figure dans aucune archive locale: on allait se gauger dans l'eau glacée du lavoir, là où on savait que l'horrible mélusine ne se risquait jamais!
Lexique de mes bourguignonneries:
drouille: diarrhée
La fin des vacances arrivait à grands pas - sonnant la fin des réjouissances - alors, au risque d'attraper la drouille et une tisane on sacrifiait à Notre tradition, celle qui ne figure dans aucune archive locale: on allait se gauger dans l'eau glacée du lavoir, là où on savait que l'horrible mélusine ne se risquait jamais!
Lexique de mes bourguignonneries:
drouille: diarrhée
embistrouiller:
embêter
esquinter:
abîmer
galopin:
verre
gauger:
tremper
se
goberger: s'empiffrer
gueuder:
rassasier
jarter:
marche très vite
tisane:
engueulade
viauner:
sentir mauvais
Alors en Bourgogne aussi on "esquinte", nous aussi à Rive de Gier, ou l'on parle un gaga mâtiné de franco provençal (ou l'inverse plutôt). Comme quoi, le monde est petit!
RépondreSupprimerMis à part ça, bien agréable texte de souvenirs d'enfance. Moi aussi mon pépé s'appelait Marcel...
Pas fâché qu'on ait quelques points communs en plus du plaisir de se lire!
RépondreSupprimerRavie d'avoir mis un pied dans votre blog. C'est drôle et rustique comme j'aime.
RépondreSupprimerBienvenue sur mon blog, lyselotte.
RépondreSupprimerJe n'écris jamais aussi bien que quand j'évoque ma Bourgogne natale !