Réédition sur le thème
du 31-01-2012
Hilda la Rousse |
A la voir dormir comme un
bébé repu après la tétée, qui dirait qu'autrefois Hilda la
Rousse était la reine du plumard? Oh, pas pour faire une
siestounette ni ronfler elle-même mais pour vous faire ronfler la
boîte à plaisir.
Quand je l'ai connue elle
pesait pas cinquante kilos mais elle était suréquipée niveau
airbags, de quoi vous emprisonner le bigoudi entre ses roberts pour
vous faire entonner La Paloma en azerbaïdjanais.
A l'époque ma Hilda avait
déjà un solide appétit, elle vous descendait un bocal d'olives
sans cracher les noyaux et s'enfilait un civet de cerf sauce Grand
Veneur jusqu'au brame pour finir sur une tête de moine et trois
religieuses au café.
Au début j'étais du
genre manchot mais à force de l'entendre me répéter "Pas
de bras, pas de wonderbra", je me suis vite converti à son
sport favori.
Fallait la voir enchaîner
sans respirer la montée du Tourmalet sur le grand plateau suivie
d'une brouette de Zanzibar à la tanzanienne et vous décoller la
pulpe du fond avant que vous ayez déniché le décapsuleur.
Si je calais en route
Hilda me larguait sur le bas-côté - le zigouigoui en bandoulière -
pour finir en solitaire comme si on n'avait pas pris le départ
ensemble.
C'est comme ça que j'ai
appris que son canard bouffait des piles au lithium!
Elle aurait dû vivre au
XXIème siècle ma Hilda, à l'époque du « tout connecté »,
des selfies, des vibromasseurs Bluetooth, des assistants de lecture
érotique, des mini-caméras et de tout ce qu'on est en train de
présenter au grand salon high-tech de Las Vegas !
Aux Oscars du paddock,
Hilda la Rousse aurait décroché celui du meilleur scénario
original, du meilleur montage et de la meilleure actrice.
Très jeune elle avait eu
un certain Oscar, un maquereau qui lui avait mis un pied à l'étrier
et l'autre sur le trottoir et dont elle ne gardait pas le meilleur
souvenir.
Question musique
d'ambiance elle était loin du Dolby surround, elle forçait pas son
talent Hilda, juste quelques barrissements d'éléphanteau à
l'approche du marigot ponctués de petits gloussements de dinde
rescapée de Thanksgiving; moi ça m'arrangeait car je me connais:
les vocalises Beyoncéennes ça me bloque le cortex cingulaire
antérieur et par voie de conséquence ça me racornit le
lance-torpilles.
Par contre elle ne ratait
jamais un ravitaillement!
Entre deux sprints
intermédiaires j'allais lui chercher un reste de daube provençale
ou un cassoulet de Toulouse de derrière les 'Izards-Trois cocus'
qu'elle se tortorait sur le champ (de bataille) et qui réveillait
son tsunami assoupi au creux des reins.
Quand je la croyais
assouvie, à un doigt de s'endormir sur la béquille, elle repartait
pied au plancher, sautait deux rapports (de boîte) pour réveiller
le tigre du moteur et m'infliger coup sur coup le rétroviseur
jour-nuit, la soupape en folie et le créneau de la mort sans radar
de recul... comment veux-tu, comment veux-tu ?
Je ne sais pas où elle
allait chercher tous ces trucs - elle qui voyageait peu - le pilon
de Ouagadougou, le croque-madame mexicain ou la tour infernale mais à
chaque fois j'étais persuadé qu'elle était plusieurs, ma Hilda.
Elle avait dû être
déesse hindoue dans un autre monde.
Et puis un jour je lui ai
bizarrement trouvé l'oeil moins brillant et la cuisse molle ;
en soupirant elle m'a réclamé des petits LU et un recueil de
poèmes.
Elle qui ne lisait que
Gala - et encore les gros titres - s'est mise à lire Baudelaire...
« La chevelure » ; il fallait l'entendre déclamer,
alanguie dans ses oreillers:
« Ô toison,
moutonnant jusque sur l’encolure !
Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir ! »
Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir ! »
J'ai compris qu'un ressort
venait de péter dans sa boîte à libido et que tout ne serait plus
pareil désormais.
J'ai bien tenté de la
rebooster, de lui mimer Rocco et ses frères Sifredi, la Grande
Invasion et Pour Qui Sonne Le Gland - que des classiques - mais ce
fut peine perdue, ma Hilda avait raccroché sa bécane, séché sur
place et refermé définitivement le tiroir à frissons.
Usée qu'elle était ma
Hilda d'être grimpée au septième ciel en rappel, lassée du
bigoudi moustachu, crevée du triporteur de Hanoï...
Alors j'ai récupéré les
piles du canard vibrant pour mettre dans mon baladeur et depuis
j'écoute Grand Corps Malade en boucle dans mon lit en repensant à
tout ça.
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