samedi 16 juillet 2016

Bas les pattes!!

Publié sur le site MilEtUne Histoires d'après l'illustration





Aujourd'hui mes confrères – ou mes consoeurs, c'est pareil chez les hermaphrodites – arrivent tout droit et à toute pompe des pays de l'Est.
Si j'écris 'toute pompe' au singulier c'est parce qu'on n'a qu'un seul pied; pour nous c'est singulier mais pour d'autres c'est curieux... allez comprendre.
J'ignore à quoi sont dopés ceux qui viennent de l'Est pour courir si vite alors qu'ils sont lestés aux métaux lourds mais on ne m'ôtera pas de l'idée que leur bave a une drôle de couleur, une teinte genre Tchernobyl.
Ils sont polonais ou roumains – bref, c'est des Roms – alors forcément notre label “Escargot de Bourgogne” n'a plus guère de sens, ce n'est plus qu'une coquille vide.
L'autre soir j'ai croisé un(e) jeune slimak polonais(e) – là-bas ils disent pas escargot mais slimak – venu(e) de Krazin en Mazurie qui m'a abordé sous je ne sais quel prétexte; il (elle) ne faisait même pas la taille réglementaire et j'ai préféré l'ignorer que risquer un détournement de mineur(e).
On dit qu'en Floride il y a des escargots géants d'Afrique qui sont si gros qu'ils ne tiennent pas dans la main!
Est-ce que les escargots d'Afrique sont farcis au beurre noir? Personne n'a pu me répondre.

Autrefois mes aïeux naissaient, vivaient et mouraient chez nous, je veux dire ici au bord du canal de Bourgogne, dans des rangs de vigne ou dans un potager, un vrai potager avec des vraies salades où on venait nous cueillir avec délicatesse sauf entre avril et juin où on nous foutait une paix royale.
C'était notre jungle à nous et bien avant que les pesticides viennent nous empoisonner la vie en semant la mort, on y vivait comme des sauvages.
Faut dire aussi que les copains qui fréquentaient les rangs de vigne ont beaucoup souffert du sulfatage... entre l'escargot et le mildiou, les viticulteurs avaient choisi le mildiou et sorti la sulfateuse à bouillie bordelaise!
De la bouillie bordelaise en Bourgogne! Si c'est pas malheureux d'entendre ça.
Notre PDG, le Pape Des Gastéropodes avait bien tenté – toutes cornes dressées – de s'insurger contre cette ignominie auprès des autorités mais il avait fini comme de bien entendu... au beurre persillé.
Comme je sens que la recette vous intéresse: échalotes, ail, persil, sel, poivre, une noix de beurre et hop! Farcissez-nous la baraque!
Pour la crémation: Thermostat 8, ni plus, ni moins, j'insiste mais c'est du grand art et pas du bricolage.
Ça vous fait baver, hein? C'est normal... nous aussi.

Au moins nous les dodus survivants on savait mourir dignement, gastronomiquement au milieu d'un grand plat de cagouilles servi à l'occasion des enterrements.
Parfaitement, on nous servait religieusement persillés avec un sachet de cendres pour la cuisson en hommage aux cendres du défunt et ça finissait toujours par chanter comme pour un banquet de vendanges ou un mariage!
On fêtait la mort joyeusement et pour conjurer ce funeste sort, combattre l'adversité qui vous flanque pour l'éternité au fond d'un cimetière communal il y avait toujours un gai luron pour dérider la famille en deuil avec ce bon mot: ”Si haut qu'on monte, on finit toujours par des cendres”.
Il y avait toujours un violoneux ou un accordéoneux pour mettre l'ambiance et lancer le ban bourguignon... vous savez... «Lala, lala, lalalalalère... », cinq notes, deux onomatopées, neuf claquements de mains... laissez tomber, je vous raconterai ça une autre fois.
J'aperçois un groupe de roms patibulaires qui tournent autour de mon pissenlit :”Bas les pattes!!”





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